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Vieille fille
Claire Castillon   Je prends racine
Anne Carrière 2001 /  16.79 € - 109.97 ffr. / 220 pages
ISBN : 2843371597
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Le titre initial du second roman de Claire Castillon était « Vieille fille ». L’auteur a changé, pourtant il convenait très bien à son personnage de jeune fille de trente ans, naïve et décalée, dépendante de ses parents, un peu godiche, victime d’une société où il faut à tout prix ressembler à une femme libérée. Un personnage en contre-emploi, ingrat en apparence dans lequel l’auteur se glisse à merveille. La réussite du roman tient avant tout à la crédibilité de ce rôle rendu très attachant, à la justesse de la psychologie de Cécile Valette et à l’humour des situations qui nous arrache des fous rires.

Cécile Valette n’est jamais sortie de l’enfance, elle rêve au prince charmant et se donne un mal fou pour plaire : cours de gym, achat d ‘une jupe "comme dans la publicité où une jeune femme court vers le soleil couchant", coiffeur, "j’ai découpé dans un catalogue un chignon que je trouve pas mal", un vernis à ongles, une bague. Le décalage entre ses tentatives de charme, ses illusions et la réalité fait sourire puis devient pathétique. Tout le roman tend en sourdine vers on ne sait quel drame, une crise qui éclatera fatalement. Pauvre fille qui ne voit pas que les hommes autour d’elle, le beau vétérinaire Maxime, puis son patron, ne cherchent qu’à profiter d’elle. Elle vit dans un petit monde protégé, entre son oiseau Cali et son chat Brutus, elle appelle ses parents trois fois par jour, range son petit intérieur, part au bureau retrouver ses collègues.

Observatrice, Claire Castillon a eu l’idée de ce livre en écoutant une conversation dans un bus. Elle sait repérer les attitudes et démarches de ces filles un peu paumées et restitue avec justesse l’ambiance et la hiérarchie du bureau où travaille Cécile Valette : le pot, l’exercice de l’incendie, les petites tâches, les jalousies… La vieille fille reporte son affection sur ses animaux, nous fait partager ses petits bonheurs, battements de cœur, humiliations, bêtises et folies douces : "les jours où je me sens très en forme, je m’offre un oléolé". Elle semble ne pas souffrir de son sort, insensibilisée, gommée, soumise, elle espère sans chercher à évoluer. Ses réactions sont des plus inattendues : aucune complaisance, aucun pathos lorsque la crise éclate. Lorsqu’elle se fait violer, elle regarde par la fenêtre soucieuse, que personne ne la voit. Elle a un pied dans le XIXème siècle, un charme désuet qui n’opère plus aujourd’hui. Tout son drame est là, alors qu’une demoiselle trouvait sa place au sein de sa famille, la solitude, les impératifs de la réussite et du bonheur ne font qu’accentuer son désespoir.

L’histoire de Cécile Valette paraît simple : elle est dramatique, emblématique de notre civilisation. L’émotion naît de ses espoirs constamment déçus d’être aimée : "Je voudrais avoir un homme avec deux grands bras de koala, sans égard pour les méchants, plein d’amour pour ma tristesse", répète-t-elle. Claire Castillon nous laisse la liberté de ressentir puisque sa narratrice exprime peu d’émotions. Nous en lui sommes reconnaissants. On retrouve avec plaisir la folie de l’écriture du Grenier, les images originales, le ton personnel de ce jeune auteur à part. Ce portrait tendre, en demi teintes d’une douce vieille fille et de sa vie quotidienne, ses coups de blues, ses compensations, sa culpabilité, ses bouderies, nous plonge dans un univers enfantin, délicieux où le temps s’est arrêté, laissant la place aux petits émois du cœur, à la poésie de l’instant.

Un roman émouvant et drôle, qui fait réfléchir sur la difficulté pour une femme différente de s’accepter et de s’adapter face aux diktats imposés aux femmes qui les anesthésient : régime, consommation frénétique, stress, libération sexuelle, mode… Un roman à rapprocher de celui d’Isabelle Sorrente L (Lattès), qui rejette une société boulimique, une écriture qui confirme un talent fait de sensibilité et d’originalité.


Emmanuelle de Boysson
( Mis en ligne le 22/08/2001 )
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