| Raymond Carver Raymond Carver - Oeuvres complètes L'Olivier 2011 /
- Tome 1 : Débutants, Septembre 2010, 332 p., 22 , ISBN : 978-2-87929-659-3
- Tome 2 : Parlez-moi d'amour, Septembre 2010, 185 p., 14 , ISBN : 978-2-87929-660-9
- Tome 3 : Tais-toi, je t'en prie, Octobre 2010, 315 p., 15 , ISBN : 978-2-87929-663-0
- Tome 4 : Les Vitamines du bonheur, Octobre 2010, 253 p., 15 , ISBN : 978-2-87929-661-6
- Tome 5 : Les Trois roses Jaunes, Février 2011, 182 p., 15 , ISBN : 978-2-87929-662-3
- Tome 6 : Qu'est-ce que vous voulez savoir ?, Février 2011, 123 p., 12 , ISBN : 978-2-87929-781-1 Imprimer
Curieux personnage que cet écrivain différent qui parle avec une feinte indifférence de gens ordinaires. On est désarçonné au départ par cette façon à la fois détachée et précise de voir les situations et l'on en cherche les raisons sans vraiment pouvoir cerner comment il installe son ambiance.
Ces raisons sont au premier abord dordre stylistique, Carver arrivant à raconter beaucoup de choses en peu de mots bien choisis, avec des phrases courtes, dans un mélange de discours oral et de réflexions philosophiques : pour preuve les deux premier tomes Débutants et Parlez-moi damour. Les 17 nouvelles du premier tome sont racontées à nouveau dans le deuxième, dans le même ordre avec presque le même vocabulaire, sans changer les histoires ni les chutes (seuls les titres sont différents) mais en apportant chaque fois quelque chose de nouveau avec de moins en moins de mots, le premier tome faisant 305 pages et le second 181. Un exercice de style à la Raymond Queneau, assez stupéfiant, mais quil ne reprend pas dans les deux autres tomes Tais-toi, je ten prie et Les Vitamines du bonheur, toujours des nouvelles, plus détaillées, plus intérieures aussi.
Au-delà du style qui simpose maintenant comme il sest imposé à lépoque, le fond de luvre contribue fortement à la création de cette ambiance si particulière. Il est question de lAmérique profonde, de gens peu fortunés, de loosers, de personnages ordinaires aux prises avec des situations simples qui deviennent pour eux dramatiques. Les héros sont malheureux, déséquilibrés, incultes souvent, angoissés, perdus, mais attachants, pas méchants, se débattant pour sortir de situations improbables ou dramatiques dans lesquelles, parfois, ils se sont mis tout seuls. Carver a bien connu cette misère psychologique et financière et il en parle avec une compréhension et une tendresse qui nous rapproche de ses personnages et nous fait sidentifier à eux.
Quelques points forts, tels la mort de Scotty, ce petit garçon dont la mère avait commandé, puis oublié, un gâteau danniversaire le jour où il a été renversé par une voiture. Le pâtissier, lignorant, déstabilise les parents au téléphone en demandant régulièrement et anonymement des nouvelles du petit
La décision prise par Al dabandonner leur chienne à linsu des enfants et de sa femme
Lamour profond de deux personnes âgées accidentées incapables de se passer lune de lautre
Le naufrage dans la folie dun simple desprit obnubilé par les poissons quil a installés dans son étang
Lascension sociale dun homme qui devient gouverneur et dont la mère se cache tellement elle a peur de lui
On va dhistoires en histoires, toujours étonné de ce style qui semble cahotant, mêlant pensées réfléchies et remarques décalées, mais on avance sans lassitude et l'on comprend au bout du compte pourquoi Raymond Carver suscite toujours autant dadmiration que dinterrogations.
Deux nouveaux tomes de ces uvres complètes, les sixième et septième, viennent tout juste d'être publiés par les éditions de l'Olivier : Les Trois roses Jaunes et Qu'est-ce que vous voulez savoir ?
Dany Venayre ( Mis en ligne le 02/02/2011 ) Imprimer | | |