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Littérature -> Romans & Nouvelles |
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Fantasmes. Prendre sur soi le Mal... | | | Mazarine Pingeot Pour mémoire Julliard 2011 / 14 € - 91.7 ffr. / 85 pages ISBN : 978-2-260-01831-5 FORMAT : 13,2cm x 20,5cm Imprimer
Un court texte (85 pages en typographie large) pour dire la détresse qui sempare dun petit garçon qui regarde un soir seul à la télévision Nuit et Brouillard, alors que sa baby-sitter est absorbée par une longue conversation téléphonique. Il en demeure marqué à vie, endosse le drame du génocide et cherche tout au long de son adolescence, à la suite dune autre perte, celle de sa grand-mère, à sabîmer dans le drame, la faim, décidant de ne plus salimenter pour ressentir au plus près les sensations des juifs victimes de la Shoah, lui qui nest pas juif et est né bien longtemps après la guerre. Il devient anorexique et ne trouve que dans un ultime sursaut la volonté de vivre malgré tout, en dépit de lHistoire et du passé. En fin de récit, il est père dune petite fille et imagine leurs échanges, avant de conclure et cest la dernière phrase du livre : «Elle deviendra historienne»
Pourquoi pas ? Le sujet en soi, qui pose le devoir de mémoire, question obsédante dans notre société, nest pas inintéressant ; on peut également y croiser dautres thèmes : léducation, la transmission, le pouvoir des images, labsence des parents, etc.
Cependant, on aurait aimé un autre traitement littéraire ! Le procédé de narration : écrire tout le récit à la deuxième personne du singulier («Tu nes pas juif. Tu nes pas un déporté. Tu nes pas un rescapé. Tu es illégitime et tu en as conscience» - p.17), na rien de neuf, Michel Butor la adopté avec un autre talent dans La Modification. Ici, loin daccroître lintensité dramatique, il lasse vite le lecteur. On peut également éprouver quelque réticence (et même considérer quil y a de lindécence) à voir une telle utilisation récupération ? de la Shoah. Quant au personnage qui est présenté comme une sorte darchétype de ladolescence en crise, ou du moins dune adolescence en crise, là aussi on peut en regretter linconsistance.
Loriginalité (!) consiste à choisir un garçon anorexique, alors que statistiquement cette maladie touche essentiellement les filles, mais au-delà de cette «audace», le récit ne présente guère dintérêt, faiblement soutenu par une écriture assez banale
La quatrième de couverture, en décrivant les grandes lignes du roman, conclut : «Comment vivre parmi les hommes après ça ? Comment devenir un homme ?»
Pour les lecteurs qui se posent cette question, renvoyons les immédiatement aux très grands textes des témoins, Robert Anthelme, Primo Levi ou Imre Kertész ; ils y trouveront des réponses autrement fortes que ces fantasmes dadolescent gâté
Marie-Paule Caire ( Mis en ligne le 19/09/2011 ) Imprimer
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