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Chaos doux
Jérôme Leroy   Un peu tard dans la saison
La Table Ronde - Vermillon 2017 /  18 € - 117.9 ffr. / 253 pages
ISBN : 978-2-7103-7551-7
FORMAT : 14,0 cm × 20,5 cm
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Guillaume Trimbert a eu son heure de gloire, son petit succès, son moment littéraire : auteur de polars gauchistes, amateur d’écrivains réactionnaires, il incarne avec une constance guillerette les ambiguïtés de l’intellectuel partagé entre un passé idéalisé et un futur désespérant, faute de révolte. Bref, Trimbert profite d’une petite notoriété pour sillonner la France, dédicacer ses ouvrages, retrouver des amis ou des connaissances, vivre et laisser le temps passer doucement… mais le temps passe, les amours aussi, l’âge avance, et le monde – ou du moins la civilisation – semble reculer.

Attentats, crises, pauvreté, censure, dévastation écologique, la Terre est devenue un endroit mal fréquenté. Et Trimbert rêve de plus en plus de fuite, de partir, de s’esquiver de sa vie, de son appartement parisien cossu, de sa mécène encombrante, de ses ouvrages. Il songe à faire comme ses amis, qui eux aussi plaquent tout, un beau jour, femme, enfant, travail, carrière, pour… autre chose.

Cette retraite existentielle a un témoin en la personne d’Agnès Delvaux, le capitaine Agnès Delvaux, services secrets, opérations douteuses, espionnage et assassinat au nom de la raison d’Etat, une jolie machine à tuer qui se passionne méchamment pour Trimbert, partagée entre une rage immense et un amour infini qui la pousse à entrer autant que possible dans la vie de sa cible. L’un fuit, l’autre suit, les deux se croisent sans se voir, se heurtent sans se toucher, dans cette dynamique générale, l’Eclipse, entre pandémie et crise morale universelle. Un chaos, mais un chaos doux, calme et paisible.

On se souvient du Bloc, ce roman décrivant l’arrivée au pouvoir d’un mouvement de droite extrême aux allures de FN : dystopie ou anticipation ?... Avec ce nouveau roman, Jérôme Leroy explore une nouvelle anticipation, celle d’une société en crise, si clivée, si désespérante, que ses citoyens l’abandonnent d’un coup, déchirant leur contrat social et fuyant la logique du marché, de la consommation, de la carrière, de la famille, etc. Une révolte douce en quelque sorte, comme une «tentation de Venise» déclinée à l’aune d’une population tout entière. Un thème forcément fascinant : qui n’a pas rêvé, une fois, de partir sans laisser de trace ?

Mais Jérôme Leroy ne se limite pas à cette hypothèse, il en observe les prémices, en laisse imaginer les conséquences, et, entre ces deux extrêmes scénaristiques, cause avec ses héros – un auteur de polar vieux beau vieillissant et toujours gentiment anarchiste de droite, et une jeune femme à la fois obéissante et révoltée –, les regarde se confronter à cette envie, jusqu’à sentir leur existence se désagréger, perdre de sa consistance. Le texte est, de la sorte, assez poétique en ce que, d’un chapitre à l’autre, les deux existences se parlent, se répondent, entrent un peu en résonance, et dressent, en creux, le portrait d’une société où l’ordre et la pensée ne parviennent plus à donner structure ni sens.

Il est alors temps de choisir son apocalypse, entre la révolution, incarnée par l’un des amis de Trimbert, Tavaniello, et la fuite. C’est alors l’histoire de ce choix de la fuite /l’Eclipse et la manière dont la société bascule, que raconte, avec un sourire complice, l’auteur. Or raconter une fin du monde (celui que nous connaissons en tous les cas, avec ces gadgets, sa frénésie, son flot incessant d’images et d’information) suppose un minimum de légèreté dans le style, une subtile distance dans la forme et une poésie sobre attentive aux petits rien qui donnent à l’existence une couleur douce. Ce roman, c’est aussi un peu une méditation sur le présent, une manière de se retirer sans fermer les yeux. Un beau roman donc, singulier et réjouissant, une petite tentation à s’offrir avec l’hiver.


Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 06/01/2017 )
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