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Littérature -> Romans & Nouvelles |
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Le diariste a la diarrhée | | | Marc-Édouard Nabe Printemps de feu Le Rocher 2003 / 20.00 € - 131 ffr. / 310 pages ISBN : 2-268-04771-7 FORMAT : 14x23 cm Imprimer
La vie de Marc-Édouard Nabe doit être un enfer. En effet, depuis son premier ouvrage, Au régal des vermines, qui fit un peu scandale, ce trublion vaguement anar de droite, se réclamant de Léon Bloy, Lucien Rebatet ou Louis-Ferdinand Céline (il y a encore du boulot) na quune obsession, qui lui demande une grande énergie : choquer, en particulier lintello de gauche bien-pensant lecteur de Télérama-Libération. Mission dune part dérisoire, de lautre pas très difficile !
Outre ses nombreux essais, Nabe se met également en scène dans des journaux intimes, gros pavés quil publie périodiquement depuis longtemps, se décrivant avec bienveillance comme un témoin-phare de son époque, maniant le potin et la délation mondaine avec délice. Car la première passion de Nabe est lui-même, et il noircit courageusement des pages et des pages pour alimenter ce quil voudrait être : un génie de la plume, bousculant lordre établi par le seule force de ses idées, guidé de plus par un amour sans failles de la Foi, de la Tradition et de la Vérité (il y a encore du boulot).
Cette obsession de la subversion amène lhomme à effectuer, au fil du temps, de curieux mouvements de balanciers, en fonction de ses engouements et haines du jour. Aujourdhui, Marc-Édouard Nabe naime pas les Américains, mais il aime beaucoup les Arabes ; il est fan dOussama Ben Laden et confesse une certaine admiration pour Saddam Hussein. Alors, quand la guerre éclate, en mars 2003, Nabe ny tient plus : il file à Bagdad, afin de rendre compte de la réalité pas celle que les méchants et bêtes et branleurs de journalistes fossoient à laune des diktats de laudimat , mais la vraie réalité, telle que lui, Marc-Édouard Nabe la vit. Comme il a beaucoup de chance, il rencontre, au départ de son aventure, une danseuse délicieuse, Schéhérazade,
formidablement belle, cultivée et avide de sexe, qui laccompagne au cours de son périple.
On le devinera, la pensée ne dépasse pas ici le niveau suivant : Marc-Édouard Nabe naime plus les Occidentaux qui sont gangrenés par lobsession du profit et soumis à la brute américaine. Marc-Édouard Nabe conchie la petite société anarcho-postmoderne branchée, qui le porta naguère au pinacle : «Seuls quelques réacs postmodernes croient encore à lOccident. Ils font semblant de le critiquer, mais au fond ils le regrettent. (
) Ah ! Je crois que ce sont ces paumés du contre-pied qui me dégoûtent le plus.» Cest un peu lhôpital qui se moque de la charité !
Mais, comme cest précisément ce petit microcosme sus-cité qui lui donne tribune, il lui faut quand même remplir son rôle : choquer. Alors, le Nabe y va, avec une prose pas fraîche et dun grand inintérêt : Vive les Arabes ! Vive le parti baasiste ! Vive le régime irakien ! Vive lécroulement du World Trade Center son dernier essai, Une lueur despoir, se réjouissait idiotement, dans un délire verbeux à la limite de lécurement, de lécroulement des deux tours. Ainsi, Printemps de feu est parsemé de réflexions dont la pertinence laisse pantois : «Les Occidentaux nen sont pas à une incohérence près. Je les appelle les "occis-mentaux", car ils ont le mental mort.» ; «Cest comme la menace bactériologique. On connaît la chanson parano depuis le 11 septembre (
) Les spores dhiver, très peu pour moi ! La fièvre Q, ils peuvent se la mettre où je pense. Ça ne ta pas suffi, le petit numéro de Colin Powell (ce faux Noir qui va devenir plus blanc que Mickael Jackson) lorsquil est venu aux Nations unies brandir la preuve de sa
culpabilité de Saddam : une misérable fiole danthrax placebo ? La plus grande intox, cest linfo.» ; «Peut-on dire quon aime une femme tant quon ne la pas sodomisée ?» Dailleurs, le nud de lintrigue est là, que lon suit, haletant : Marc-Édouard va-t-il enfin arriver à sodomiser son amie Schéhérazade ? Dans une infinie bonté, nous tairons la réponse à cette question cruciale.
Avec Nabe, le principe est simple : quand la majorité dit blanc, il dit noir, et vice-versa. Le problème, cest que la pensée mise en avant dans ce Printemps de feu est aussi réversible quun pantalon Gap et quelle na aucune rigueur, aucune profondeur. Elle se nourrit juste du reflet scandalisé quelle pourra lire dans les yeux effarés de quelques lecteurs farouches. On pourra répliquer quil est facile de tirer sur une ambulance, alors reconnaissons à lhomme un certain sens du rythme dans son écriture, ainsi quune dévotion sincère pour les voies impénétrables de la mystique et de la foi. Mais on reste très fâché que certains sévertuent à voir dans lhomme un dangereux provocateur. Un provo raseur, plutôt.
Caroline Bee ( Mis en ligne le 29/09/2003 ) Imprimer | | |
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