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Littérature -> Romans & Nouvelles |
| Deirdre Madden Authenticité Belfond 2004 / 21.00 € - 137.55 ffr. / 386 pages ISBN : 2-7144-3911-X FORMAT : 14 x 23 cm
Traduit de l'anglais (Irlande) par Anna Gibson. Imprimer
Le sixième roman de lIrlandaise Deirdre Madden porte bien son titre polysémique. Réflexion inspirée sur lart et la condition dartiste, Authenticité bouillonne didées multiples et de sens divers.
Roderic Kennedy «pensait à sa peinture comme à une flamme, à une fragile chose lumineuse quil avait protégée avec sa vie, toute sa vie. Elle lui avait été confiée, et il avait réussi à la préserver de lextinction, malgré les vents et les tempêtes dans lesquels il lavait portée». Si le peintre a connu, au départ, une vie tumultueuse des débuts difficiles, un mariage raté, une plongée dans lalcoolisme qui le mène au bord du gouffre , il na jamais considéré son art comme «une expression de soi destinée à le servir, lui». Roderic ne projette pas ses malheurs sur la toile, mais travaille simplement à transcrire ses visions intérieures. Julia Fitzpatrick, une jeune artiste conceptuelle, en qui Roderic pense avoir trouvé lâme sur, est animée du même souffle créateur. Réfléchissant à un projet autour des souvenirs que lévocation dune odeur peut ramener en mémoire, elle accorde beaucoup dattention à la communication avec le spectateur. «Cest pour cela que je veux méloigner de la fabrication dobjets, parce que ce nest pas seulement lobjet qui est en jeu, mais la personne qui le regarde.»
Figure inversée de Roderic, William Armstrong, riche avocat que Julia rencontre par hasard dans un parc de Dublin, nenvisage pas lart de la même manière. Ayant renoncé fort jeune à la peinture pour sembarquer sur le «navire de la conformité», il est maintenant marié et père de deux enfants. Cette vie trop bien rangée, quil a pourtant choisie par facilité, létouffe. «Le masque social» cédera-t-il à la «compulsion de peindre», qui resurgit violemment ? Au fil des chapitres, lhistoire complète des trois personnages est peu à peu restituée et le tableau densemble prend forme.
En pure magicienne, Deirdre Madden fait palpiter les uvres quelle décrit. Sans intellectualisme déplacé, elle privilégie lémotion, comme Roderic lorsquil affirme «Capter lénergie primaire de la chose : voilà ce dont il devrait être question au lieu de se dire Je suis en train de regarder un tableau abstrait ou un exemple dart conceptuel, etc. » Elle maîtrise également parfaitement lart du récit. Suivant une structure circulaire impeccable, elle passe du passé au présent, alterne habilement les points de vue, parsème son roman de détails mineurs qui se révèlent dimportance majeure. Et aborde une foultitude dautres thèmes. Lamour fraternel, filial ou conjugal, par exemple, finement étudié, donne lieu à de très belles pages, simples et émouvantes. À travers la figure emblématique de lartiste, Deirdre Madden dépeint délicatement les fêlures et les blessures que la vie inflige à tous mais aussi les petits riens qui lembellissent. Un roman authentiquement magistral.
Florence Cottin ( Mis en ligne le 25/06/2004 ) Imprimer | | |
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