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Cruelle pantomime
Eric Reinhardt   Existence
Gallimard - Folio 2013 /  6.50 € - 42.58 ffr. / 270 pages
ISBN : 978-2-07-044902-6
FORMAT : 11,0 cm × 17,5 cm

Première publication en août 2004 (Stock)
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Difficile d'imaginer héros aussi peu charismatique que le Jean-Jacques Carton-Mercier autour duquel est construit ce roman d'Eric Reinhardt. Ingénieur hautement diplômé, devenu logiquement cadre supérieur dans une entreprise commerciale et conscient de la supériorité que ce statut lui confère, marié logiquement à l'épouse qui lui convient le mieux, l'individu ne parvient pas à penser la vie autrement que comme une succession de choix rationnels. Pour lui, tout n'est qu'affaire de mérite et de compétence et rien ne devrait être soumis au hasard. Nulle fantaisie, nulle place pour les coups de cœur.

Une approche des choses qui ne saurait s’accommoder éternellement des aléas de l'existence. La vie de Carton-Mercier, objet du livre et racontée par lui, prend du coup la tournure comique qu'ont souvent les destins les plus pathétiques. Dans les premières pages, Éric Reinhardt s'en donne à cœur joie dans l'étalage des pensées, souvent incongrues, du quadragénaire. Et signe quelques passages qui provoquent franchement le rire, comme cette évocation de l'achat de l'appartement du couple : «[…] je lui montre un tableau réalisé avec le logiciel Excel, les croix dans les cases, les notes attribuées à chaque critère, le total sur la dernière ligne, 25 sur 30, un score inégalable […] ce produit s'impose comme un placement incomparable alors qu'à l'opposé mon épouse manifeste quelque faiblesse pour un produit vétuste (elle dit de charme)… lequel produit… totalise un nombre de points bien inférieur, 14 sur 30, ce dont elle finira par convenir, laminée par mes arguments.»

Grand adepte de Wittgenstein, Carton-Mercier atteint véritablement des sommets lorsqu'il revient avec le plus grand sérieux sur l'épisode du choix sa future femme : «Un dimanche de pluie, installé devant la retransmission d'un Grand Prix, je soumets les jeunes filles que je connais à un programme de calcul confectionné sur ma HP […] Celle qui récoltera le plus grand nombre de points sera la mère de mes enfants […]. Apparence (coeff.1) : normale (4), jolie (3), laide (2), belle (1), très belle (0), sexy (-1), bombe sexuelle notoire (-2) […] défauts (coeff.6) : prétentieuse (-2), coquette (-2), futile (-2), dispendieuse (-2), forte personnalité (-2), sociable (-2), raisonneuse (-4).» Et ainsi pour toutes une série de critères allant de l'apparence aux traits de caractère en passant par diverses compétence personnelles. Au cinéma, on parlerait de «scène d'anthologie».

Le seul problème du livre, au fond, c'est que son intrigue et sa construction d'ensemble n'égalent pas ces évocations particulièrement réussies. Plongeant son anti-héros dans une invraisemblable histoire de réunion professionnelle manquée à cause de l'achat d'une barre chocolatée, qui finira par provoquer sa perte – l'effondrement du bel agencement rationnel et rassurant de son existence –, Éric Reinhardt emballe progressivement son manège, mêlant sur un rythme effréné les scènes du passé et du présent, superposant des dialogues à la limite de l'hystérie entre Carton-Mercier, son patron, sa secrétaire et son psychiatre. A force, il en arrive à perdre son lecteur dans ce maelström et donne parfois l'impression que la frénésie compense une certaine paresse de conception et de narration. Comme un humoriste qui, emporté par l'ivresse de ses blagues et la bonne composition du public, se laisserait emporter en oubliant la mise en scène.

On pourra arguer que cette frénésie dans l'absurdité est justement le propos du roman. Mais Existence aurait été plus abouti, si, à son indéniable sens des situations et du comique, l'auteur avait su joindre la rigueur d'une construction mieux maîtrisée. On reste sur le sentiment d'un livre plus futile que profond.


François Gandon
( Mis en ligne le 13/05/2013 )
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