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Dans le silence des torrents… | | | François Gantheret Comme le murmure d'un ruisseau Gallimard - Blanche 2006 / 12.90 € - 84.5 ffr. / 158 pages ISBN : 2-07-077507-0 FORMAT : 14,0cm x 20,0cm Imprimer
A loccasion de la mort de son père, Paul revient dans son village savoyard. Chalets, peu dâmes qui vivent et tant de fantômes dans ce hameau de bois et de sang
Car la mort y est omniprésente, celle dabord de Claire, amour de jeunesse de Paul, le seul, en fait, il semble, retrouvée morte, sauvagement brutalisée, près de la source du ruisseau qui descend jusquaux habitations
Un meurtre jamais résolu, dans un silence consolidé par les sourdes complicités villageoises. «Trente ans ont passé. Le soleil, les arbres, lodeur de lherbe et des pins, rien na changé. Les montagnes immuables, indifférentes. Le temps nexiste pas là-haut. La mort y règne, absolument.» (p.13)
Récemment séparé, venu pour vendre la ferme familiale, Paul revisite lendroit et le temps
Il songe à acheter un chalet plus petit, soumis à lirrépressible aimantation de sa jeunesse et des drames qui lont amochée. Il nest pas le seul. La sur de Claire, Béatrice, née après le meurtre, et qui ressemble étrangement à son aînée fantôme, vient aussi là pour sentir quelque chose, elle ne sait quoi. Elle est musicienne et charme Paul de sa musique, de sa jeunesse et des reflets du passé quelle porte malgré elle.
Des voisins les observent, Aline et son frère Baptiste. La vieille fille et la brute simple, liés par le sang et linceste, partagent aussi les secrets et les non-dits de la petite communauté. De près en fait, mais à quel point ?... «Il y a des choses
il faut bien quelles finissent un jour. Surtout quand elles sont mortes depuis longtemps.» (p.152)
Après Les Corps perdus (Gallimard, 2005), François Gantheret livre ce Comme le murmure dun ruisseau qui pourrait sintituler aussi Les Âmes mortes si Gogol nétait passé par là. Comme dans son précédent ouvrage, le romancier séduit par les ambiances insolentes, poisseuses et éthérées, où sinscrivent ces écorchés vifs qui nous ressemblent, maudits, hantés, humains. Drame psychologique et thriller, lintrigue ne serait rien sans le décor que lauteur plante, ces ambiances montagnardes ou lensauvagement humain le dispute à la pureté des lieux. Leau cristalline des ruisseaux est marbrée ici de filets de sang avec ce paradoxe qui ne coule pas de source : leau passe, comment dirait lautre, mais le temps, pas.
Bruno Portesi ( Mis en ligne le 26/04/2006 ) Imprimer
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