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Littérature  ->  Essais littéraires & histoire de la littérature  
 

Jean-Claude Albert-Weil, morpionneusement vôtre…
Jean-Claude Albert-Weil   Réflexions d'un inhumaniste - Entretiens avec François Bousquet
Xenia - Franchises 2007 /  14 € - 91.7 ffr. / 139 pages
ISBN : 2-88892-020-4
FORMAT : 13,0cm x 19,5cm
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Apparemment, François Bousquet goûte la fréquentation des énergumènes aux patronymes à rallonge… Après avoir salué la mémoire du fondateur de L’Idiot international dans son Jean-Edern Hallier ou Le Narcissique parfait (Albin Michel, 2005), le voici à présent face à Jean-Claude Albert-Weil, pour recueillir ces stimulantes et jubilatoires Réflexions d’un inhumaniste et les publier chez Xénia, au sein d’une collection très justement intitulée «Franchises».

Afin de mieux appréhender l’étonnante figure qui s’apprête à prendre la parole ici, autant commencer par la préface et, surtout, par les deux articles reproduits en annexe. L’ami Bousquet y énonce, avec la délectable fermeté critique qui lui est coutumière, les composantes majeures du monde total, halluciné parce qu’archéofuturiste et uchronique, qu’Albert-Weil dépeint a fresco dans sa luxuriante trilogie chez L’Âge d’homme : Europia, Franchoupia et Sibéria. Du style – voire de l’inflation verbale – qui porte cet immense projet scriptural méconnu du grand public, Bousquet signale qu’il reflète l’excès de violence de son maître d’œuvre : en effet, «Franchoupia est un livre délictueux, diffamatoire, meurtrier comme un contrôle drastique des naissances, obscène comme un charnier».

Nous nous trouvons dès lors en présence d’un Fou du Labo 4 qui touille allègrement Céline, le jazz et le surréalisme en ses athanors et aboutit à un précipité à fumette thermonucléaire ; un Rabelais abonné à Science et vie depuis l’âge de quatorze ans, et dont le «langagevo» («langage évolutif») ne recule devant aucun néologisme ou mot-wagon pour faire dégorger à la langue tout son suc. Cette inventivité, conjuguée à la moindre des corrections politiques, renvoie Albert-Weil du côté de ces tonitruants qui cuisent à l’étouffée dans leur époque, modèle Karl Kraus, et dont Walter Benjamin avait pertinemment décelé que leur esthétique mêlait inextricablement théorie réactionnaire et praxis révolutionnaire.

Passé ces premiers uppercuts, on peut se laisser aller à écouter le démiurge. Bousquet a eu l’intelligence de retrancher ce qui, en général, alourdit la lecture d’entretiens, à savoir les questions et les remarques de l’interviouveur. Les propos tenus par Albert-Weil ont donc subi une réécriture, bien sûr parfaitement accordée à son diapason si particulier, et se présentent sous forme de brefs chapitres. D’emblée, on est happé par la voix qui anime ces pages : on la devine frémissante, au bord de l’éruption, avant de se brider ; toujours connivente bien que souvent stellaire ; se dégageant en un tournemain de la plus engluante grégarité pour la légèreté même. Souvenirs d’enfance, voisinages littéraires, musicaux et philosophiques, références à Freud et à Sartre, explications sur des processus élaborés de création langagière, considérations sur l’orgasme, le malthusianisme ou la physique quantique… Le tout constitue, en définitive, une excellente mise en appétit pour le profane, qui sent monter l’envie de s’attaquer au plat de résistance.

Bousquet l’affirme : «La littérature contemporaine, sous sa forme vivante et libre, aura de plus en plus une existence souterraine, marginale, parallèle, clandestine, et peut-être même ne circulera-t-elle plus que sous la forme incontrôlable du samizdat. Ce sera pour elle le meilleur moyen de s’assainir, de regagner son autonomie, d’aborder enfin le monde en face, tel qu’il est, avec confiance.» Les Réflexions d’un inhumaniste se verra certes boudé par le «syndicat des omerteurs» mais fait d’ores et déjà partie de ces volumes qui ne circulent que sous le manteau de certains : ces rares qui restent convaincus que les écrivains se nichent encore quelque part, en troglodytes patients.


Frédéric Saenen
( Mis en ligne le 19/03/2007 )
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