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Littérature -> Littérature Américaine |
| Neil Gordon Le Dernier d’entre nous 10/18 - Domaine étranger 2013 / 9,60 € - 62.88 ffr. / 576 pages ISBN : 978-2-264-05960-4 FORMAT : 11,1 cm × 18,0 cm
Éric Moreau (Traduction) Imprimer
Troisième roman de Neil Gordon, Le Dernier dentre nous (adapté à lécran par Robert Redford sous le titre The Company you keep) revient sur les années 60, années de contestation, aux États-Unis.
Neil Gordon a choisi la forme contemporaine du roman épistolaire, cest-à-dire un roman-email, pour mettre en scène plusieurs personnages vivant aux États-Unis, qui sadressent à leur jeune interlocutrice : Isabel, dix-sept ans, qui vit en Angleterre. Le roman souvre sur un mail envoyé le 1 juin 2006 par «Papa» - littlej@cusimanorganics.com - à Isabel Montgomery - isabel@exmnster.uk - avec en CC Le comité. Objet : lettre 1 : «Mon Izzy chérie, Tous les parents sont de mauvais parents. Cest la première chose que je tiens à te dire».
Au total, 42 mails jusquau 25 juin 2006. 42 mails au cours desquels chacun des protagonistes aura raconté à Isabel ce qui sest passé dix ans plus tôt (et dix-sept ans auparavant) et qui a bouleversé sa vie. En 570 pages, redéfilent pour le lecteur des fragments de lAmérique des années 60 : musique de Bob Dylan, guerre du Vietnam et opposants farouches, étudiants dextrême gauche rassemblés entre autres dans le groupe «Weather underground». Une Amérique au bord de la guerre civile, et lorsque la paix revient, la question se pose du retour à la vie «normale» pour les différents acteurs. Jim Grant, le père dIsabel et ses amis, est au moment du récit un avocat reconnu, qui choisit avec soin ses causes et reste fidèle à une éthique exigeante.
En 1996, pour une raison que le lecteur ne découvre quà lextrême fin du livre, Jim et ses proches racontent à Isabel cette longue histoire dactivisme politique, de rêves dune autre société, de choix de vie, de clandestinité assumée pour les uns, de normalité retrouvée pour les autres. Deux générations : celle de Jim et celle du jeune journaliste Ben, des regards différents. Le livre se clôt sur un épilogue daté du 4 juillet 2010 (jour symbolique, celui de lIndépendance américaine, un jour de fête nationale) ; lAfghanistan a remplacé le Vietnam, la guerre est toujours à lhorizon
Lidée du roman est intéressante : revenir ainsi en flash-backs sur les années 60, années de violence aux États-Unis, avec en contrepoint lévolution des personnages ; le choix du suspense permet aussi de tenir en éveil le lecteur : pourquoi ce mystérieux «Comité» éprouve-t-il ainsi le besoin de raconter à Isabel des faits tus depuis si longtemps ? Quattendent-ils delle ? De mail en mail, se dessinent des personnalités, des regards un peu différents.
Cependant on regrette que dans cette histoire nécessairement âpre - aucun de ces personnages quel que soit son camp (FBI ou contestataires) ne pouvait être enfant de chur - Neil Gordon ait fait le choix de ne montrer que des gentils : le héros central Jim, sa famille, les femmes qui lentourent - quelle laiment ou quelles le quittent. A la rigueur, son beau-père peut apparaître comme un roué manipulateur, homme politique à la carrière brillante
cest presque un pléonasme. De ces temps de lutte sans merci, dont les États-Unis ont longtemps gardé des traces vives, on pourrait peut-être attendre davantage que ce récit lisse.
Cependant la lecture est plaisante, lattention reste soutenue, et on plonge sans réserves dans cette lecture dun rêve américain qui se fracasse puis se reconstruit
Marie-Paule Caire ( Mis en ligne le 16/01/2013 ) Imprimer | | |
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