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Le fusil de Tchekhov
Alice Munro   Trop de bonheur
Seuil - Points 2014 /  7,80 € - 51.09 ffr. / 400 pages
ISBN : 978-2-7578-4328-4
FORMAT : 11,0 cm × 17,8 cm

Première publication française en avril 2013 (L'Olivier)

Jacqueline Huet, Jean-Pierre Carasso (Traducteurs)

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Du côté de Castle Rock, publié en 2009, devait être son dernier livre. Il s'avère réjouissant qu'Alice Munro ait changé d'avis et porte une nouvelle fois l'art de la nouvelle au zénith. Est-ce un clin d’œil de la part de celle que Cynthia Ozick a surnommée «notre Tchekhov» ? «Trop de bonheur», qui clôt le recueil et lui donne son titre trompeur, raconte les derniers jours de Sofia Kovalevskaïa, une romancière et mathématicienne russe du dix-neuvième siècle. Pour brosser le portrait de cette femme d'exception, Alice Munro part de faits historiques et biographiques précis comme elle le faisait dans Du côté de Castle Rock puis les modèle au gré de son imagination.

«Même l'épidémie de Copenhague pouvait à présent se transformer en élément d'une ballade, s'intégrer à une vieille légende. Comme sa propre vie, dont les cahots et les chagrins se muaient en illusions. Les événements et les idées prenant une forme nouvelle, envisagés au travers de couches d'intelligence lucide comme un verre déformant». Cette pensée de Sofia illustre à la perfection la manière dont procède Alice Munro. Certes «Trop de bonheur» se distingue des neuf autres nouvelles par sa longueur, son sujet, son époque et son décor, bien loin de l'habituel Ontario, mais la dissection des rapports humains et la réflexion sur ce qui rend chaque vie unique et singulière y sont tout autant présentes. La nouvelle s'achève sur la mort de Sofia qui succombe à une pneumonie.

Maladies, meurtres, comportements déviants, cruauté insoutenable, la tonalité du recueil est plutôt grave. Ce n'est bien sûr pas la description d'épisodes dramatiques ou traumatisants qui intéresse véritablement Alice Munro mais ce qui a pu les provoquer, les répercussions qu'ils entraînent et la façon dont des personnages très différents les uns des autres parviennent ou non à se reconstruire. Une jeune femme qui a changé de vie après un drame familial mais que le passé poursuit («Dimensions»), une étudiante qu'un prédateur sexuel réussit à briser moralement sans la toucher («Wenlock Edge»), une mère que l'un de ses enfants rejette («Trous-Profonds»), une femme d'âge mûr qui n'a jamais pu oublier l'accident tragique qu'elle a provoqué lorsqu'elle était petite («Jeu d'enfant»).

La force des textes s'explique comme toujours par leur densité et leur impeccable construction. Aucun détail superflu et des va-et-vient constants mais surtout éclairants entre passé et présent. S'ajoute souvent une célébration subtile du pouvoir des mots et de l'imagination. Dans «Radicaux libres» par exemple, où Nita, veuve et gravement malade voit surgir chez elle un vagabond assassin dont elle réussit à se débarrasser, telle Shéhérazade, en s'inventant un passé de meurtrière !

La prose d'Alice Munro est un régal, mais, mauvaise nouvelle, à quatre-vingt-deux ans, l'immense nouvelliste a annoncé sa retraite définitive du monde des lettres. Son dernier recueil Dear life n'est pas encore traduit en français. «Un recueil de nouvelles, pas un roman. Voilà qui est déjà en soi une déception. L'intensité du livre en paraît diminuée, cela fait passer l'auteur pour quelqu'un qui s'attarde à l'entrée de la littérature, au lieu d'être assurément installé à l'intérieur». On imagine aisément l'air malicieux d'Alice Munro lorsqu'elle prête ces paroles à Joyce, l'héroïne de «Fiction». Car en matière de littérature, notre Tchekhov canadienne est assurément installée sur un trône !


Florence Bee
( Mis en ligne le 23/06/2014 )
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