| Vassilis Alexakis Je t'oublierai tous les jours Gallimard - Folio 2007 / 5.60 € - 36.68 ffr. / 255 pages ISBN : 2-07-033636-0 FORMAT : 11 x 18 cm
Première publication en août 2005 (Stock). Imprimer
Vassilis Alexakis est un écrivain façon Janus, grec de naissance et de langue, français de langue aussi et dadoption. Cest en français que cet auteur transfrontière écrit, français maîtrisé et littéraire, porteur dune uvre reconnue et estimée sous nos latitudes. Citoyen du monde, ce jeune Grec passé par lEcole de journalisme de Lille, est, en somme, un authentique Parisien. «Le rétablissement de la démocratie na pas eu toutefois grand effet sur ma vie. Jai simplement pensé que labrogation de la censure me permettrait un jour de publier mes livres en Grèce. Il fallait naturellement commencer par les écrire, et je navais pas lintention de le faire en grec. Jétais devenu une sorte de résident permanent de la langue française.»
Aujourdhui moins jeune, lécrivain approfondit, semble-t-il, le travail sur soi et son passé. Je toublierai tous les jours est un long récit adressé à la mère, morte depuis plus de quinze ans. De sa plume, lauteur rattrape le temps perdu et raconte à la mamma grecque leur vie ensemble et la sienne depuis quelle est partie. Doù un récit/mémoires où la mère, finalement, sefface pour que le fils, vivant, se mette en scène, avec son époque. Ces mémoires sont aussi des chroniques du temps présent, quand la plume se fait entropique et décrit, un peu amère, le temps des Jeux Olympiques sous ultra-surveillance policière et Athènes travestie en vitrine du monde occidental, temps du téléphone portable où la communication outrancière tue la communication, du terrorisme international, etc. Ces pages-là convainquent moins que l'évocation du lien maternel, hélas trop souvent chuchotée.
En fait, le récit ne tient pas les promesses des premières pages. Celles-ci, originales et touchantes, installent la relation entre les deux personnages ; la mère sy dessine tout comme lamour que lui porte son fils. La suite, lévocation de ladolescence estudiantine en France, les allers-retours entre la Grèce et Paris, creuse la distance entre les deux êtres : «le fossé linguistique qui nous sépare». De sorte que, cest bien tous les jours, comme lannonce le titre, que cette mère est oubliée. Loubli prend le dessus et ce roman en apporte la preuve, illustrant toute lambivalence identitaire de ce fils de Grèce socialisé en France.
Bruno Portesi ( Mis en ligne le 26/02/2007 ) Imprimer | | |