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Autoportrait au manteau rouge
Nelly Kaprièlian   Le Manteau de Greta Garbo
Grasset 2014 /  18,50 € - 121.18 ffr. / 288 pages
ISBN : 978-2-246-85233-9
FORMAT : 14,0 cm × 20,5 cm
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L’auteur se rend à Los Angeles en décembre 2012 en vue d’un projet de documentaire sur Greta Garbo : elle assiste à la vente aux enchères de huit-cents pièces provenant de la garde robe et des objets personnels de l’actrice. Elle se rend acquéreur de la pièce «Pink Ialongo Coat, 1956», un manteau au «col monacal, trois gros boutons, ample, une laine bouclée rouge cerise», qui l’attire irrésistiblement mais dont elle nous confie qu’il n’est pas son genre. Ce manteau-cape, d’aspect presque animal, cette peau sanglante qui, de façon trouble, cache et rend visible à la fois, devient alors le pré-texte à une sorte de voyage initiatique dans les plis et replis du vêtement et du travestissement.

Ce manteau n’était pas non plus le «genre» de Greta Garbo qui ne l’a porté qu’une fois (comme tellement d’autres vêtements de sa garde robe). Mais de quel «genre» parlons-nous ici ? Car, à l’image de Garbo, les exemples foisonnent (Wilde, Dietrich, Bowie, etc, …) de ces passages d’un genre à l’autre, du masculin au féminin, d’une identité à l’autre, à de multiples autres, en une sorte de vertige vestimentaire quasi-hitchcockien.

Ce texte qui, à l’origine se voulait un essai, une réflexion sur les différents rôles joués par le vêtement, se transforme, de fil en aiguilles et de films en vies, en fictions, en un «roman». Le manteau de celle qu’on appela «La Divine» ou «Le Sphinx» sert de fil (rouge) d’Ariane pour dévoiler, dévêtir et démasquer les symboles sociologiques, psychologiques ou érotiques de ces accessoires qui revêtent le corps (glamour hollywoodien ou phénomènes de mode) mais aussi autorisent le devenir Autre, la possibilité d’avoir la peau de l’Autre, de l’autre corps (corps mort qu’on ne peut oublier et qu’on tente de ressusciter, corps fantasmé qu’on rêve de devenir, corps créé de toutes pièces pour se réinventer).

Le vêtement joue le rôle d’un objet magique, d’un accessoire mythologique, d’un signe. Symbole de pouvoir (argent, ambition, reconnaissance sociale, appartenance à groupe culturel mais aussi dictature de la mode qui asservit et vampirise les corps) mais, plus encore, de désir (tantôt travestissement, fétiche, écrin qui magnifie, sarcophage qui emprisonne ou matrice corps-mère qui rassure), il tient lieu d’une, voire de multiples identités avec lesquelles jouer ou se reconnaître. Ou se perdre. Les vêtements racontent une histoire et Nelly Kaprièlian aussi : histoires d’actrices, de rock stars, de stylistes, d’écrivains, entremêlées à celles, réelles ou rêvées, de la narratrice qui passe du «je» au «elle», d’un vêtement à l’autre, dans une écriture qui se travestit pour vêtir de multiples vies. Car le vêtement est romanesque, le vêtement est écriture : il cache une multitude de fictions.

A l’instar de textes cités par l’auteur, tels Dracula, Frankenstein, ou Les Liaisons dangereuses, dont l’écriture est construite de fragments disparates (lettres, journal, témoignages), écriture forcément monstrueuse à l’image de la créature de Frankenstein formée de parties de corps morts, cousues les unes aux autres pour créer le roman, l’auteur nous offre une galerie de portraits, qui prend l’aspect d’une galerie de miroirs. Son livre-patchwork est tissé des reflets iconiques et scintillants de l’âge d’or du cinéma, brodé de citations littéraires, ornementé d’exemples de créateurs sublimes et sacrifiés. «Le texte que je suis en train d’écrire, nous dit-elle, est un corps hybride composé de textes, films, vies des autres, où je n’en finis pas de me retrouver, labyrinthe qui me constitue, puzzle qui prend forme et forme mon autoportrait. (…) Seule l’écriture lui avait offert cette vie alternative dont elle avait toujours rêvé, un espace de liberté totale, où l’on pouvait faire apparaître ou disparaître, où les mots avaient le pouvoir magique d’incarner les choses».

Lovez-vous dans Le Manteau de Greta Garbo, comme dans ce repli de peau (définition zoologique de «manteau»), ce Ptyx mallarméen pour, à votre tour, vous travestir et vivre d’autres fictions. Car l’habit fait le moine !

Nelly Kaprièlian est journaliste littéraire aux Inrockuptibles et intervenante à l’émission ''Le Masque et la Plume''. Le Manteau de Greta Garbo est son premier roman.


Sylvie Koneski
( Mis en ligne le 29/08/2014 )
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