Louis Stettner Sous le ciel de Paris Parigramme 2016 / 14 € - 91.7 ffr. / 96 pages ISBN : 978-2-84096-997-6 FORMAT : 20,9 cm × 22,1 cm
Cavanna (Préface) Imprimer
Parigramme réédite aujourdhui un bel ouvrage paru initialement en 1999, ce dont on peut se féliciter, on le verra, mais en regrettant toutefois que rien nindique quil sagisse dune réédition à lidentique. Bel ouvrage, disons nous, car les photographies données ici font voir poétiquement un Paris dont nous avons tous la nostalgie, même si nous ne lavons pas connu. Louis Stettner est en effet cet Américain, inspiré par Brassaï, qui a commencé à Paris sa longue carrière de photographe internationalement reconnu et dont les clichés ont cette qualité qui la fait souvent comparer à Doisneau.
On aura donc plaisir à découvrir ou redécouvrir ces instants de vie urbaine, essentiellement des années 50, même si quelques clichés des années 90 ont été glissés ça et là. Clichés en noir et blanc, évidemment, assortis de légendes poétiques ou pittoresques, quelques fois malicieuses, mais jamais méchantes. Stettner est attentif aux gens du peuple, vieillards, travailleurs, mais aussi enfants dans la lignée de Poulbot, même sil ne sinterdit pas, parfois, des vues dépourvues de personnages, souvent des quais déserts qui semblent avoir sa prédilection. Leur point commun en est la construction, élégante, et surtout la qualité des contrastes issus dhabiles contre-jours.
On comprend ainsi que son uvre à la fois esthétique et documentaire ait pu séduire Cavanna, son uvre, mais également sa personnalité. Dans sa préface que lon retrouvera avec émotion, Cavanna rappelle en effet quil a connu Stettner de longue date et quil a été non seulement séduit mais impressionné par ses clichés mais aussi par «sa belle barbe, sa belle gueule de boucanier», que lon retrouve dans lautoportrait qui clôt louvrage, description et portrait qui peuvent au demeurant sappliquer tout autant à Cavanna lui-même ! En conclusion de sa belle introduction, Cavanna ne peut éviter de tomber dans la nostalgie dune ville qui nexiste plus, non pas que ses habitants aient disparu, dit-il, mais parce quils ont changé, adoptant au fil du temps tous les codes de la modernité. Mais aussi par le fait que les pauvres ont été chassés vers la banlieue, alors même que, paradoxalement, les clochards se sont multipliés. Et de conclure que lhomme, certes, sadaptera toujours au monde qui change mais que le monde décrit par Stettner lui deviendra plus étranger encore que ne lest le Moyen-âge pour nous.
Revenons au présent pour conclure, moins sévèrement que Cavanna, que le lecteur aura grand plaisir à se promener avec Stettner dans un monde certes éloigné sinon disparu mais dont le charme demeure intact, charme renforcé par la qualité éditoriale à laquelle Parigramme nous a habitués de longue date et quil est donc inutile de souligner davantage !
Jean-Etienne Caire ( Mis en ligne le 06/07/2016 ) Imprimer |