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Poches -> Littérature |
| Jean-Claude Lalumière La Campagne de France Le Livre de Poche 2014 / 6.60 € - 43.23 ffr. / 232 pages ISBN : 978-2-253-17674-9 FORMAT : 11,0 cm × 17,8 cm
Première publication en janvier 2013 (Le Dilettante) Imprimer
Alexandre et Otto sont des entrepreneurs culturels, dignes héritiers dun Malraux : au volant de leur culturobus (un bus orange, qui fonctionne au colza, racheté à un homme politique en manque délecteurs), ils promènent leurs clients parmi les hauts lieux de la culture française, selon des thématiques qui associent littérature, poésie et paysages.
Autant dire quils nont pas un client et que leur affaire est en train de couler, gentiment mais sûrement. Et pour ces deux docteurs ès lettres, professeurs en rupture de ban, la case départ menace. Prêts à sacrifier la grande culture à la santé financière de leur petite entreprise, les voilà donc lancés pour un dernier baroud dhonneur, qui, de Mauriac aux Ch'tis, use du prétexte des relations franco-allemandes pour flatter le cinéma populaire français.
Et il y a même du client : un groupe de retraités, hétéroclite, accepte de se lancer dans laventure. Mais le voyage se meut en une odyssée qui entraine les deux héros dans des aventures surprenantes, à travers les vestiges dune tempête, dans une usine devenue un décor, ou sur laire dune autoroute désertée, un jour de grève. La culture, lamour et leurs aléas : le tableau de lexception culturelle en prend un coup, mais lart de vivre à la française en ressort-il grandi ?
Après avoir observé, avec une douce ironie, les murs révolues du Quai dOrsay, Jean-Claude Lalumière sattaque à la culture, non pas la grande, mais celle qui résiste, celle des soutiers de la gloire. La Campagne de France est un roman à la fois drôle et triste : drôle en ce quil suit les pérégrinations burlesques dune bande de «Français moyens» qui, partie sur la base dun projet plutôt laxatif sur les hauts lieux de la relation franco-allemande, prend des chemins de traverse pour découvrir la réalité dun pays, et dune campagne, où la culture évolue. Car nos retraités veulent connaître la vraie vie et voir la réalité du pays. Jean Claude Lalumière sen donne alors à cur joie et ballade ces pieds nickelés dans des étapes de plus en plus délirantes, accumule les dialogues absurdes et les situations improbables, les quiproquos (à commencer par les scénarios complexes et les amours contrariés dAlexandre).
On retrouve lhumour nonsense du Front russe, avec une touche de tendresse supplémentaire au passage, car lâge a ses privilèges mais aussi ses soucis. Mais, au-delà, il y a le constat un peu triste dune certaine culture, élitiste, qui ne prend plus, qui ne séduit pas, à lheure du ''bigdil'' et de la téléréalité
quelque chose qui meurt dans lindifférence générale, discrètement.
On samuse donc, dans ce roman qui exploite avec verve une certaine conception de la culture : cette déclinaison touristique du Front russe vaut le détour.
Gilles Ferragu ( Mis en ligne le 28/03/2014 ) Imprimer
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