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Roman de gare…
Jean-Marie Laclavetine   Matins bleus
Gallimard - Folio 2006 /  6.40 € - 41.92 ffr. / 336 pages
ISBN : 207032107X
FORMAT : 11,0cm x 18,0cm

Première publication en août 2004 (Gallimard - Blanche).
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L'écrivain ressemble par quelques traits à l'enfant hagard devant sa boule à neige. Il regarde le monument figuré, pris dans son eau distillée et calme, jusqu'à ce qu'il décide de l'agiter fiévreusement, électrisant les particules plastiques qui, suivant les routes tracées par la danse du poignet, créent l'illusion de l'enneigement, un ballet blanc dont le narrateur/spectateur lit les trajectoires individuelles...

Jean-Marie Laclavetine semble opérer ainsi. On l'imagine à la table d'un café, dans cette grande gare parisienne, furetant dans la posture de l'écrivain sans vergogne, attentif aux vies qui s'y croisent, s'y bousculent, pressées par des horaires à respecter, des journées qui commencent, semblables aux hiers et aux demains... une inlassable noria de pas perdus ; «... on pourrait revenir à n'importe quelle heure de n'importe quel jour on trouverait ici un minerai inépuisable, l'orpailleur le plus myope remonterait dans son crible une profusion de paillettes, c'est ainsi, c'est la gare, fleuve de vies au-dessus duquel plane un oiseau triste», explique-t-il. Raison pour laquelle, dans le drame que l'écrivain met en place, des vies piochées s'incrustent, prises çà et là et numérotées avec une application tout entomologique. N'est-ce pas la condition de l'écrivain que de voler des débris d'existences pour les poser, figés, sur la vitrine de son oeuvre ?...

Mais dans le maelström humain de cette gare, scène insupportable du quotidien, où le temps s'égraine au gré des panneaux d'affichage, où la modernité s'incarne sur les papiers publicitaires, les titres des quotidiens sur les étals des «Relais H», le roman reprend ses droits. Car Matins bleus ne tire de ces galeries de personnages banals, tragiques ou ennuyeux, de la rumeur de cette gare surpeuplée, que l'arrière-plan de son drame. Celui-ci sort de la masse humaine des personnages singuliers, qu'il lie entre eux dans une journée en fait particulière, étirée entre 6h30 et 17h08. Son roman est alors «un écheveau à défaire, c'est un tissu complexe et doux, qu'inlassablement le temps carde.»

Il y a Zitta, jeune pommée, genre no future, fantôme de la gare dans sa splendeur juvénile, accompagnée de son chien. Il y a cette famille improbable : Léo, tout aussi jeune, le regard noir d'un fils accablé par un père inconséquent et crapuleux, et sa mère, Anita, qui tient un de ces stands de presse où se croise la foule anonyme. Il y a aussi José, garçon de café façon autre siècle. Quelques anti-héros choisis par l'auteur, qu'il nous présente et nous fait aimer, sorte de tribu sortie d'un film de Genet, avec la même poésie mais un ton plus bas. Car ces Matins bleus sont d'une teinte glauque, froide, et l'on sait, dès les premières lignes, que tout cela finira mal.

Le lecteur, prévenu, lira le roman avec un rapport au temps particulier, étrange dilatation dans l'étau d'un compte à rebours. Et si le narrateur, qui se complait à intervenir dans ce puzzle habile - n'oublions pas qu'il joue avec sa boule à neige -, intervient dans le récit, fier deus ex machina, parfois de façon agaçante, rien dans ce roman ne laisse entendre qu'il s'agit là d'un simple jeu...


Bruno Portesi
( Mis en ligne le 01/03/2006 )
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