L'actualité du livre Jeudi 18 avril 2024
  
 
     
Le Livre
Poches  ->  
Littérature
Essais & documents
Histoire
Policier & suspense
Science-fiction

Notre équipe
Littérature
Essais & documents
Philosophie
Histoire & Sciences sociales
Beaux arts / Beaux livres
Bande dessinée
Jeunesse
Art de vivre
Sciences, écologie & Médecine
Rayon gay & lesbien
Pour vous abonner au Bulletin de Parutions.com inscrivez votre E-mail
Rechercher un auteur
A B C D E F G H I
J K L M N O P Q R
S T U V W X Y Z
Poches  ->  Littérature  
 

Bréviaire du Mal
Pierre Péju   Le Rire de l'ogre
Gallimard - Folio 2007 /  6.60 € - 43.23 ffr. / 400 pages
ISBN : 9782070342525
FORMAT : 11,0cm x 18,0cm

Première publication en août 2005 (Gallimard - Blanche).
Imprimer

Des massacres perpétrés par les Allemands «à l'Est» aux massacres tels qu'ils continuent d'être perpétrés aujourd'hui partout dans le monde, Pierre Péju a construit un roman sous forme de manuel d'histoire. Des années quarante aux XXIe siècle, d'une guerre à l'autre, les personnages ici imaginés servent de reflets à une grave réflexion sur l'humanité du Mal suivant une chronologie récente...

Pierre Marleau est un adolescent sombre et poète, fils d'un résistant mystérieusement assassiné au jardin du Luxembourg, qui vient passer ses vacances chez un correspondant bavarois. «Impossible de me laisser aller à cette quiétude douceâtre en compagnie d'êtres humains qui s'imaginent que rien, désormais, ne les menace». Le folklore teuton, la verdure alpine n'y font rien : Pierre est porteur malgré lui d'un doute ontologique, Le doute à vrai dire, celui tristement penché sur l'exponentielle capacité humaine à tuer et détruire... «Oui, le monde n'est que l'effort que fait Dieu pour s'anéantir lui-même, horrifié par sa propre création... Le monde, avec tout ce qui s'y passe, n'est que la contorsion suicidaire de Dieu qui tente de gâcher un peu plus son sale ouvrage, de ruiner sa divinité. Le grand gâchis d'un Dieu qui tente d'en finir. Sans fin !»

Son exutoire aux spectres du Mal : l'art, autre capacité humaine à contourner l'Obstacle, sublimer la noirceur par quelques mots, quelques traits, le modelage d'un peu de roche. Adolescent, Pierre dessine : «Le dessin comme une saignée. La bile mauvaise évacuée au bout de la mine. Pages pleines de visages grimaçants, d'yeux exorbités. Blocs de souvenirs qui ne m'appartiennent pas». Adulte, il sculpte. La Création comme antidote au néant. Dans l'horreur ineffable de l'extermination nazie, Lafontaine, officier allemand discipliné mais dépassé par les événements, résiste quant à lui par la plume ; il «voudrait préserver le plus longtemps possible cet abri d'écriture. Le carnet comme une mince coquille protégeant un dernier reste de douceur humaine, la croyance en quelque chose d'humain.» Acteur malgré lui, faiblement, humainement, de tueries incroyables, il reviendra en Bavière, se mariera et donnera naissance à une fille, l'énigmatique Clara...

Clara dont Pierre fait la connaissance lors de son séjour allemand. Début des années soixante. Ils sont liés pour la vie car tous deux sont porteurs de cette même angoisse, qui pousse Clara à photographier. Elle devient par la suite reporter de guerre... On suit leur menuet sur plusieurs décennies ; absence impossible, amour improbable, ils se retrouvent immanquablement... Mais Pierre poursuit sa vie, découvre la sculpture et épouse la rayonnante Jeanne, son contraire, une pile à espoir, à travers qui la vie coule plus sereinement. Lui, il demeure imperméable à cette autre évidence, retenu par «la cruauté et le goût du sang enfouis dans la douceur»...

Tatillon, on reprochera à Pierre Péju cette dilatation narrative sur le temps long d'un demi-siècle, d'une vie... Car les premières pages, alternant l'horreur de la guerre et les moments adolescents d'un séjour bavarois, auraient pu constituer un roman en soi, se suffire à elles-mêmes et constituer un sublime ouvrage. Les chapitres suivants déçoivent ainsi un peu, dans l'accélération du temps, de l'histoire, et l'abandon de cette première narration. Car ici, l'auteur excellait dans l'empathie avec l'horreur, capable de comprendre et de décrire l'avancée hagarde d'hommes tueurs dans la tragédie de l'histoire, dont les raisons échappent à la raison...

Mais c'est en vouloir au premier de la classe d'avoir moins excellé dans son dernier essai. Le Rire de l'ogre n'en reste pas moins un roman dans lequel la richesse du propos le dispute à la beauté de la plume et une intrigue toujours captivante.


Bruno Portesi
( Mis en ligne le 05/02/2007 )
Imprimer

A lire également sur parutions.com:
  • La Petite Chartreuse
       de Pierre Péju
  • La Vie courante
       de Pierre Péju
  •  
    SOMMAIRE  /  ARCHIVES  /  PLAN DU SITE  /  NOUS ÉCRIRE  

     
      Droits de reproduction et de diffusion réservés © Parutions 2024
    Site réalisé en 2001 par Afiny
     
    livre dvd