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Rien qu'une femme...
Virginie Despentes   King Kong Théorie
Le Livre de Poche 2007 /  5 € - 32.75 ffr. / 160 pages
ISBN : 978-2-253-12211-1
FORMAT : 11 x 18 cm

Première publication en octobre 2006 (Grasset).
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On pensait que le combat féministe se cantonnait sous nos latitudes au malaise des banlieues, auprès de beurettes violées, tabassées, «putes et soumises», pour détourner une expression en vogue. Ce qui, en soit, lui conserve hélas toute sa légitimité. Mais on pensait donc que la lutte initiée durant les années 60 avait perdu de sa force, que la victoire avait été remportée, que les femmes avaient gagné à la force du poing cette parité leur revenant de droit, à commencer par le contrôle de leur fécondité (qui n'implique pas, on le comprend ici, celui de leur sexualité). On fermait certes les yeux sur de flagrantes injustices, l'inégalité devant l'embauche, les écarts de salaires et la reproduction de schémas patriarcaux quelque peu poussiéreux. Victime d'une malicieux aveuglement mâle... Car peut-on lire King kong théorie si l'on est homme ?...

On abordait donc le dernier opus made in Despentes avec un méchant a priori, pensant qu'une diva des lettres contemporaines – certes pas Colette, certes pas Beauvoir -, habile au jeu de la provoc' vociférante (sexe, viol et rock n' roll) n'était plus la plus mal lotie au royaume des souffrances féminines. On osait même penser que c'était chez elle comme un art de vivre, sinon un fond de commerce, la va-tout pornographique, la rage née du viol, le choix de la prostitution, tout un habitus brodé de colère et nourri de lectures ad hoc, que l'auteure cite d'ailleurs : Norma Jane Almodovar (Cop to Call Girl, 1993), Carole Queen (Real, Live, Nude Girl, 1997), Scarlot Harlot (Unrepentant Whore, 2004), Margot St James (cit.p.90), mais aussi Judith Butler (Gender trouble, 1990)... Comme l'hallucination intellectualisée et universalisante d'un malheur passé : «j'ai souffert or je suis femme, donc toute femme doit ou bien a dû souffrir comme moi». «Souffrir, et ne rien pouvoir faire d'autre. C'est Damoclès entre les cuisses.»

Bref, on se la jouait condescendant, voire paternaliste. «T'exagère, Virginie, quand même, de quoi tu manques ?!». «La dichotomie mère/putain est tracée à la règle sur le corps des femmes, façon carte d'Afrique». Bien dit mais déjà vu, et frelaté, non ?...

Et puis... Au fil de lettres écrites parfois au sang, la vie de Despentes s'étoffe. On y comprend la douleur, la haine même d'une femme qui, aujourd'hui encore, n'est jamais qu'une femme... On y découvre Despentes et ce qui fait la poète enragée actuelle. Le moment/viol d'abord : «Impossible. Il est fondateur. De ce que je suis en tant qu'écrivain, en tant que femme qui n'en est plus tout à fait une. C'est en même temps ce qui me défigure, et ce qui me constitue.» Le choix de la prostitution ensuite, tout un palimpseste de vie qui, couche après couche, a fait la femme actuelle, jusqu'au recul final, sous forme d'essai, empruntant beaucoup aux théories queer, aux gender studies et maints cas d'école plutôt anglo-saxons (voir la bibliographie en fin d'ouvrage).

Et derrière cette femme, la Femme, toujours incomprise et malmenée, victime et reproductrice de schémas ancestraux reconduits de même par des hommes encore enfants, fils à maman, petits derniers chéris ou fils uniques adorés, n'ayant jamais appris les saveurs du partage, et pour qui, encore et toujours, la femme serait ce trou, cette béance, magicienne au fourneau, méprisée au dehors... Car on peut être magistrate, écrivain ou physicienne et souffrir, à trop aimer, attachée au petit prince devenu tyran. La faute aux mères (Moix dit la même chose dans son dernier essai/roman), la faute aux hommes, la faute aux femmes. Alors, tournons la page...


Thomas Roman
( Mis en ligne le 31/10/2007 )
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