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Une éducation bourgeoise
Caroline Sers   Les Petits Sacrifices
Le Livre de Poche 2011 /  6,50 € - 42.58 ffr. / 250 pages
ISBN : 978-2-253-12777-2
FORMAT : 11cmx18cm

Première publication en août 2008 (Buchet Chastel)
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1914, quelques mois avant la Première Guerre mondiale, la famille Dutilleul baigne dans l’élégance de la grande bourgeoisie et dans la rigidité des mœurs propres à son rang. Henri, le père, est un brillant homme d’affaires et Marie, sa femme, régente l’imposante maison, organisant avec minutie et sévérité les diverses tâches des employés et l’éducation des enfants. Ces derniers, au nombre de quatre, vivent différemment l’absence et la discrétion du père et l’intransigeance de la mère. Pierre, Jean et Geneviève sont respectivement les aînés de Charlotte, à peine âgée de 8 ans. Deux drames durant la très mondaine soirée de l’été, suivis de la guerre meurtrière vont engendrer la dislocation de la famille Dutilleul admirée et respectée par tous.

1934, amputées de leurs hommes, l’existence des femmes Dutilleul se poursuit dans l’obsession maladive du maintien de leur statut bourgeois. Charlotte est à présent une jeune femme qui devient l’épouse, pour des raisons obscures mais dénuées de sentiments amoureux, d’Alain. Le couple vit à Saint-Germain-des-Prés dans un appartement proche de celui de Marie. Nicole est leur premier enfant ; suivront des jumeaux. Tandis que Charlotte perpétue l’éducation au vitriol de sa jeunesse strictement basée sur le respect de la morale et l’anéantissement de toute individualité, Geneviève devient une femme atypique aux portes du féminisme. Les tensions sont extrêmes entre les deux sœurs et la mère.

En 1953, Nicole est âgée de 19 ans. Considérée comme une rebelle depuis sa plus tendre enfance, elle se noie dans de perpétuels conflits avec sa mère et sa grand-mère qui vivent comme une menace intolérable ses revendications d’autonomie et son rejet catégorique de l’apprentissage des mœurs bourgeoises. Nicole rêve d’une vie de femme libre et émancipée telle que la revendiquent déjà les féministes. Son obstination juvénile se bute aux résolutions presque monstrueuses de ses deux aînées.

Cette saga familiale dépeinte par Catherine Sers est corrosive et acide. Les hommes dans ce roman sont absents, inconsistants. Leur image est plutôt terne et caractérisée par la fuite. Ils ne s’immiscent pas dans l’éducation de leurs enfants et s’écrasent volontairement devant l’autorité presque hystérique de leurs femmes, même s’ils sont témoins de la souffrance de leurs progénitures. Ils n’assument rien, chiques molles qui fuient dans le travail et les relations professionnelles. Face à ces marionnettes masculines, les femmes sont des épouvantails, terrifiantes, et distillent leur fiel à tout va comme si leur survie en dépendait. Le statut social est le moteur de l’éducation. La femme est comme dépositaire d’un rang constitué de manières et de fonctions précises qui exigent une totale abnégation. Comme soumises à un héritage tortionnaire, Marie puis Charlotte semblent n’exister qu’en défendant leur place dans la société bourgeoise et toutes leurs frustrations sont soulagées dans la violence de leurs mots, dans l’absence de tendresse et finalement leur rejet de la maternité. Les femmes sont purulentes de souffrance et ankylosées dans leur incapacité à être elles-mêmes. Geneviève, qui a réussi à s’extirper de ce schéma généalogique, apparaît comme plus détendue et apporte une vision d’espoir.

Ce roman illustre la difficile démarche consistant à se soustraire des codes sociaux transmis de génération en génération, socles d’un modèle sociétal figé. L’intrigue et son ignominie sont captivantes.


Frédéric Bargeon
( Mis en ligne le 16/09/2011 )
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