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Bande dessinée -> Autre |
| Eric Drooker Blood Song - Une ballade silencieuse Tanibis 2010 / 24 € - 157.2 ffr. / 308 pages ISBN : 978-2-84841-015-9 FORMAT : 16,5x24 cm
Préface de Joe Sacco Imprimer
Après avoir publié en France lexplosif et marquant Flood !, les éditions Tanibis poursuivent leur travail en sortant aujourdhui ce superbe Blood Song, deuxième roman graphique de Eric Drooker, sorti aux Etats-Unis en 2002.
Comme pour Flood !, cest un récit entièrement muet que propose lartiste américain. Et comme pour donner une dimension universelle à son récit, Drooker part du grand rien, du big bang et de la création de la voie lactée. Puis, ce long travelling filé conduit vers une province asiatique non identifiée. Ici, on est proche de lEden, lorsquon se nourrit de chasse et de pêche et que lon finit la journée en famille, dans une hutte au coin du feu. Puis cest linvasion barbare, celle des soldats occidentaux qui viennent tout raser au nom dune guerre qui ne concerne pas grand monde de ce village. Une rescapée fuit sur une embarcation de fortune ; les hasards de locéan la mèneront dans la gueule du loup
Avec précision, Drooker suit le périple de cette jeune femme, symbole de linnocence saccagée et de civilisations massacrées. Là où Flood ! sinscrivait dans une mouvance pamphlétaire et élaborait un discours de protestation, Blood Song sélève un cran au-dessus, choisissant de poser ses armes à un niveau quasi mythologique, brassant avec aisance et dans un même élan graphique cosmogonie vertigineuse, mythes fondateurs et temps de vie à léchelle humaine.
Après Flood !, le dessin de Drooker sest encore affiné. Si la technique reste la même, celle de la carte à gratter, elle se double ici de couleurs délicatement posées à laquarelle et surtout dune plus grande maîtrise de lensemble. Aux images dures, sèches et violentes de Flood ! répondent ces visions dapparence plus souples, ce style plus posé. Baignés dans un flot bleuté, ces plans nen gardent pas moins toujours une force expressive particulière.
Dans la majeure partie du livre, Drooker privilégie un découpage aéré et régulier, les pages se faisant face se répondant, se complétant ou se contredisant parfois dans un subtil jeu de correspondances et de faux raccords, donnant ainsi au lecteur une impression despace, comme un souffle général qui accompagnerait avec force le discours voulu universel du récit.
Cest ce même souffle qui conduit le récit dans une trajectoire ample à la fois continue et ponctuée de discrètes déviations. Ainsi, les premières images de la grande ville façonnent une cité mouvante et sans identité fixe : on pense dabord à un Manhattan revisité, puis à une cité lacustre rêvée pour enfin revenir vers lidée dune grande ville américaine, la Grande Pomme pourrie chère au cur de lartiste. Drooker laisse ainsi aller ses visions au fil des pages, faisant de son récit un discours vivant et en perpétuelle transformation.
Lensemble est dune grande virtuosité et se lit dans un même mouvement, comme une pellicule qui défilerait sous nos yeux. Du grand art à la portée de tous.
Alexis Laballery ( Mis en ligne le 22/11/2010 ) Imprimer
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Ailleurs sur le web :Le site d’Eric DrookerLes éditions Tanibis | | |
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