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Bande dessinée -> Historique |
| Wilfrid Lupano Gaël Séjourné L’Homme de l’année - 1967 - L’homme qui tua Che Guevara Delcourt - Neopolis / Série B 2013 / 14.30 € - 93.67 ffr. / 56 pages ISBN : 978-2-7560-3537-6 FORMAT : 23x32 cm Imprimer
On connaît la formule célèbre de Horace, « La Grèce conquise conquit son farouche vainqueur » ou comment une défaite militaire peut devenir une victoire culturelle
La capture et la disparition dErnesto « Che » Guevara en Bolivie, en 1967 recèlent les mêmes accents de défaite victorieuse : cest du moins le sens de ce bel album, à lhumanisme révolutionnaire. On suit lhistoire de Mario, un jeune soldat bolivien appartenant, en 1967, à la compagnie qui finit par encercle et capturer le Che et ses compagnons, venus établir en Bolivie un « foco » (foyer) révolutionnaire. Une fois les révolutionnaires capturés, et enfermés dans une école devenue prison improvisée, la situation change
Les soldats veulent venger les compagnons tombés dans la bataille, mais le Che est un prisonnier de marque, et bientôt, des gens très importants arrivent dans le village avec une question : que faire de ce prisonnier fort encombrant. Mario, un peu naïf, un peu exalté, sera linstrument du destin, lhomme qui tua Che Guevara
mais bientôt, il prend conscience du poids de ce destin, entre vengeance, malédiction et catharsis. Dans une Bolivie contemporaine, marquée par la figure dEvo Morales, Mario, désormais âgé, se demande sil a vraiment tué le Che !
Cest un bel album que Lupano et Séjourné consacrent à la figure de Che Guevara, un album en sympathie, non pas nostalgique mais plutôt dans lespérance, une sorte de fin heureuse au diptyque que Steven Soderbergh avait consacré au Che. Un retour aux sources également, autour dun médecin devenu révolutionnaire et guérillero par envie dagir, et qui, dans cet album connaît une victoire posthume, via la médecine publique. Si le vrai héros est indiscutablement Mario, que son erreur de jeunesse (une bravade devenue criminelle) hante jusquà la vieillesse, la figure de Che Guevara christique au possible (certaines images exploitent joliment liconographie chrétienne domine lensemble, en réponse au traumatisme éprouvé par son assassin. Un scénario habile, discrètement militant de Wilfrid Lupano, servi par un graphisme doux, au réalisme sobre. Les deux auteurs se sont trouvés : pas de grands effets, mais des visages qui sinterrogent et souffrent, des regards échangés, des dos qui se courbent sous le poids des soucis et des injustices. Gaël Séjourné fait la démonstration dun beau talent et dune retenue qui souligne les enjeux du scénario et en éclaire les subtilités. Lensemble est quasi cinématographique, et séduira les fans du Che, mais également ceux qui cherchent, au delà des affrontements idéologiques, quelques vérités sur le sens de lhistoire. Un album réussi, qui confirme lintérêt de lapproche de cette série, LHomme de lannée.
Gilles Ferragu ( Mis en ligne le 12/11/2013 ) Imprimer
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