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Souris puisque c’est grave...
Ai Yazawa   Paradise Kiss (vol. 1)
Dargaud/Kana 2004 /  7,30 € - 47.82 ffr. / 178 pages
ISBN : 2-87129-688-X
FORMAT : 13x18 cm
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Alors qu’elle se rend à ses cours du soir, Yukari tombe sur un étrange trio. Isabella, Miwako et Arashi, élèves à l’école des arts Yazawa, cherchent justement un mannequin pour porter leurs créations lors de la fête de fin d’année. Intimidée et choquée par la manière un peu brutale d’agir des jeunes gens, Yukari refuse violemment la proposition et, dans sa fuite, perd sa carte « étudiant ». Pour la récupérer, l’adolescente est donc contrainte de retourner à l’école Yazawa, où elle rencontrera une faune toute particulière, et notamment un certain Georges. Ce premier contact avec le monde du stylisme bouleversera à jamais sa jeune vie de lycéenne sage…

Tout droit sortis d’un magazine de mode, les personnages de Paradise kiss présentent des physiques pour le moins étonnants : un travelo hyper-sophistiqué, un dandy gay, une Lolita ingénue et un punk « body-arté », voilà le cocktail détonnant que forme ce panel éclectique d’êtres auréolés d’un épais mystère. Intrigants et fascinants à la fois, les protagonistes de Yazawa (qui n’hésite pas à donner son nom à l'école d’art !) ne manquent pas de classe et portent en eux une forte ambiguïté. Looks branchés, silhouettes longilignes et rêves plein la tête, ces jeunes gens ne semblent en outre douter de rien.

Cette confrontation avec des individus épanouis et maîtres de leur destinée renvoie ainsi un peu brutalement Yukari au vide sa propre existence. En effet, notre jolie héroïne, malgré son jeune âge, mène déjà une vie qu’elle n’a pas choisie, poussée par ses parents à poursuivre des études dans une grande faculté. Aspirant à vivre d’autres vies, cet appel du large grisera une Yukari désireuse d’en finir avec son asservissement quotidien. L’étourdissante liberté de ces jeunes gens vivant sans peur du lendemain et sans compromis insufflera à l’adolescente la force d’être enfin déraisonnable et de se libérer des chaînes invisibles qui l’ancrent dans une réalité étouffante. Un véritable choc !

Juste invitation à « se réaliser », le scénario prône ici le principe de plaisir dans toutes les dimensions qu’il englobe et encourage l’accomplissement des désirs les plus profonds qui nous animent. Souvent poignant et tout en contraste, il met en scène avec humour les questionnements naïfs et tout à la fois lucides d’une héroïne à fleur de peau : poussée par des sentiments contraires, l’attendrissante Yukari intellectualise de manière très excessive ses amours adolescentes mouvementées et ne manque pas d’imagination...

Enfin, soulignons le dessin classieux du manga, dont le trait original suscite des atmosphères tour à tour décontractées, moroses ou dramatiques en réalisant un univers d’une grande cohérence. De plus, la complexité des relations unissant les différents personnages et l’intrication confuse des sentiments de tout un chacun réalisent parfois des scènes renversantes d’authenticité. Un premier tome plein de charme et de panache.


Océane Brunet
( Mis en ligne le 15/01/2005 )
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