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Bande dessinée  ->  Réaliste  
 

Une petite ville si tranquille
Simon Hureau   Tout doit disparaître
Futuropolis 2006 /  23 € - 150.65 ffr. / 208 pages
ISBN : 2-75480-082-4
FORMAT : 20x27,5 cm
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C’est une petite ville de Province qui s’éteint peu à peu. Les commerces ferment, les rues se vident et les murs s’abîment. Tout le monde se connaît mais personne ne se parle : il y a celui qui a fait de la prison, le couple échangiste, le vieux qui ne sort que la nuit (et qu’on appelle Dracula), celle qui a gagné au loto, ou encore le brillant étudiant qui ne quitte plus sa mère. Le dimanche, on s’ennuie, et les autres jours, c’est à peu près pire. L’été touche à sa fin, et les deux copines Sabine et Alicia reprennent le chemin du lycée. Deux petits événements égayent toutefois quelque peu cette rentrée : d’abord, il y a un nouveau garçon, un Parisien, José, fils d’un promoteur immobilier. Et puis surtout il y a Mélusine, jeune fille au look gothique et au comportement joyeusement rebelle et provocateur, et qui travaille maintenant au tabac du coin. Rapidement, les trois jeunes filles vont faire connaissance et se lier d’amitié. Par l’intermédiaire de Mélusine, Sabine et Alicia découvrent un nouveau monde et des distractions inédites. Et dans cette bourgade envahie par la sinistrose, tout est bon à prendre pour rendre la vie un peu moins triste et monotone.

Après nous avoir raconté sur deux superbes albums ses escapades à l’autre bout du monde (Palaces et Bureau des prolongations, Ego comme x), Simon Hureau revient à la fable sociale sans morale et au climat sombre et glauque déjà en place dans Colombe et la horde. Le décor, franchouillard et anodin, a perdu de son charme et de ses traditions qui auraient fait le bonheur d’un Jean-Pierre Pernaut. La ville est comme en suspens entre la vie et la mort, hors du temps, hors du monde. Quelques initiatives plus ou moins heureuses - comme celle de ce promoteur qui rachète les vieilles demeures afin d’en faire des résidences de villégiature - tentent de redonner un dernier électrochoc à la bourgade mais le déclin est maintenant engagé sur une pente trop raide pour espérer changer quoique ce soit. Les lieux sont débarrassés de leur première utilité, preuve d’un abandon total et impitoyable : le vieil abri bus ne sert plus qu’à squatter, l’entrepôt déserté devient lieu de crime et même la mer, toute proche, ne fait plus rêver personne. Chaque chapitre porte le nom d’un lieu, montrant l’importance de ces décors comme restés en coulisses et qui prennent la poussière. Quelques-uns des meilleurs moments de ce livre proviennent de ces planches où les protagonistes invisibles s’expriment derrière les façades : alignements de murs défraîchis derrière lesquels on se cache, on complote, on jase, on tue même. Hureau excelle brillamment dans la mise en scène de cette petite ville grise et pluvieuse où tout tourne au ralenti.

Dommage alors que la dernière partie de l’album sombre dans une ultra-violence à la limite du ridicule. C’était déjà le point faible de Colombe et la horde qui présentait un misérabilisme sans humour et sonnant creux. Ici, la chute déçoit plus qu’elle ne surprend: ce qui n’était jusque-là qu’une tranche de vie deviendrait, rétrospectivement l’examen minutieux d’un fait-divers atroce, de ses causes jusqu’aux horribles conséquences. Seul moyen pour la ville de faire parler d’elle, chez Jean-Pierre Pernaut ou ailleurs. Mais au final, l’idée ne satisfait pas totalement d’autant que les motivations et les comportements des intéressés restent, pour le coup, passablement flous. La violence comme unique et ultime recours fait tomber le récit jusqu’alors sobre et mesuré dans un spectaculaire outrancier qui touche tout le monde sans exception ; vision négative et sans espoir, et surtout sans nuances.
Malgré ce dénouement qu’on aurait aimé plus sobre, l’album reste d’une belle maîtrise autant dans la narration que graphiquement. Il y a comme du Forest dans ce trait au pinceau que rien ne semble jamais pouvoir fatiguer : les décors sont fouillés, précis, les personnages bien campés, et les pages ne laissent pas de répit au lecteur. L’album se lit avec un intérêt constant, et au-delà d’une histoire qui s’égare dans ses derniers instants, on gardera en mémoire une belle ambiance et un grand talent de conteur.


Alexis Laballery
( Mis en ligne le 12/12/2006 )
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