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Bande dessinée -> Fantastique |
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La théorie du grain de sable | | | Marc-Antoine Mathieu Julius Corentin Acquefacques (tome 6) - Le Décalage Delcourt 2013 / 14.30 € - 93.67 ffr. / 56 pages ISBN : 978-27560-3108-8 FORMAT : 23x31 cm Imprimer
Comme dans LOrigine, Julius Corentin Acquefacques est mis devant un fait difficilement compréhensible: il est un héros. Lui, le rêveur en pyjama, il est « au et le » centre dun drôle dunivers fait de cases, de dessins et de mots. Sans réellement comprendre de quoi il sagit, Julius sait quil tient un rôle important, primordial dans ce drôle de monde. Aussi, lorsque dans cet album il disparaît purement et simplement, réduit à une présence en creux et en « voix off », cest tout un monde qui sécroule. Ne restent plus en effet que des personnages secondaires (le voisin de Julius, les frères Dalenvert et le professeur Ouffe, déjà aperçus dans LOrigine), qui errent dans la page comme de pauvres âmes en peine. Que sont des personnages secondaires sans un héros ? Peuvent-ils vraiment tenir une intrigue ? Et sinon y a-t-il un intérêt à une histoire sans récit ? Les compagnons de Julius, désoeuvrés, se posent un tas de questions: des personnages en quête non pas dauteur mais de héros. Au final, il faut se rendre à lévidence, un récit sans son héros, ça nest rien, et voilà la petite troupe partie vagabonder dans le rien (comme dans La Qu...), cette étendue de sable, cette page blanche infinie. Cette partie du livre est le prétexte pour Mathieu à un festival de jeux de mots, où lauteur, en bon élève de Raymond Devos, tire sur les expressions pour en tirer tout ce quil peut. Cest drôle, à la limite parfois de lexercice facile, mais suffisamment bien raconté pour que lon ne décroche pas.
Plus tard, une fois Julius retrouvé et réintégré à son histoire, cest une autre aventure qui commence, celle qui conduira tout ce petit monde à retrouver la terre ferme, un monde familier, le livre dont ils sont les personnages.
Au final, et cest là tout le principe du livre, cest un récit qui tourne en boucle, qui se mord la queue. Il en était plus ou moins de même pour LOrigine ou Le Processus par exemple, mais Le Décalage va encore plus loin puisque à la différence de lalbum de 1998, cette dernière aventure tourne vraiment en rond, sans début ni fin. Dans Le Processus, le déroulement de laction était soudainement perturbé par un élément imprévu (en loccurrence une horloge défaillante). Cet incident insignifiant entraînait des conséquences désastreuses pour Julius et tout son petit monde qui était désormais condamné à revivre encore et toujours la même histoire dans une spirale infernale et sans fond.
Avec Le Décalage, le lecteur est plongé dans ce récit sans début ni fin... dès le début ! A tel point quon a du mal à définir un véritable point de départ; dou cette géniale idée de Mathieu de « commencer » son récit par la planche 7. On retrouvera au fil de lalbum la couverture, puis la quatrième de couverture, puis la première planche. Toutes les pages ayant ainsi glissées, doù le décalage du titre... Le livre a ainsi perdu son autorité, cest lhistoire qui prend le dessus sur lobjet, quitte à faire peur à léventuel lecteur (diable ! un livre sans couverture !). Il y a même, sacrilège ! des pages déchirées. Encore plus que la bande dessinée, cest le livre même, lobjet, qui est ainsi cette fois au centre des préoccupations drôles et ludiques de Mathieu.
Lensemble est tout simplement brillant, riche en rebondissements, rempli didées folles et de bons mots, et de plus comme toujours parfaitement dessiné. On était sorti un peu fatigué et déçu de 3 secondes, mais avec ce nouveau livre, Mathieu signe lun de ses plus réjouissant album, alliant avec brio le sens du divertissement et les trouvailles narratives.
Alexis Laballery ( Mis en ligne le 12/03/2013 ) Imprimer
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