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Bande dessinée -> Chroniques - Autobiographie |
| Aude Picault Transat Delcourt - Shampooing 2009 / 14.95 € - 97.92 ffr. / 176 pages ISBN : 978-2-7560-1798-3 FORMAT : 14,7x21 cm Imprimer
Aude Picault est lhéroïne de son livre. Dans ce Transat autobiographique elle raconte sa traversée de lAtlantique à bord dun navire. Parenthèse ouverte aux grands vents au milieu dun quotidien gris Paris triste et routinier. Aude est graphiste, toujours en guéguerre contre des clients pénibles, la cafetière rebelle et le trafic des rues qui en veut à son vélo. Voilà une jeune femme au bord de la crise de nerfs, jamais réconfortée par de fausses amies hystérico-débiles et se sentant de plus perdue, sans but : « Jai perdu cette petite étincelle qui donne son sens au quotidien ». Et même son travail, a priori plus proche du plaisir que de la mine, ne trouve plus grâce à ses yeux : « Jalimente limmense fleuve dimages inutiles et superficielles ».
Il faut donc un électrochoc, un changement radical au risque de senfoncer définitivement dans lennui et de passer à côté à dix kilomètres près de sa vie. Première étape : un week-end en solitaire sur une île déserte. Loin des gens et de lagitation citadine, loin des soirées superficielles et des relations forcées. Sur lîle, le temps reprend son souffle, les jours ralentissent et font la sieste. Puis cest le plongeon dans linconnu, la traversée en transat de lAtlantique, direction les Antilles. Cest lépoque des quarts de garde, des vents contraires et des rencontres avec des marins deau salée et agitée.
En écho à ce changement datmosphère, les planches saèrent radicalement. Au rythme effréné de la vie urbaine caractérisée par des pages remplies à ras-bord de figures et de traits, suivent des planches éclaircies et spacieuses où le trait rond et souple de la dessinatrice senroule et se déroule pour évoquer vagues, cieux, nuages et vents. Le discours parle à tout le monde : qui na pas rêvé de tout plaquer pour aller vivre, pour un jour ou un mois, la vie dun Corto Maltese ? Prendre le bateau plutôt que le métro, et évoluer au rythme des saisons plutôt quà celui des 35 heures. Aude Picault, en pleine crise de trentenaire célibataire, fait le grand saut et nous embarque avec elle dans ce périple aux parfums de belle évasion.
Dans ce parcours initiatique enlevé et oxygéné, on regrette cependant certains passages qui cassent le rythme et qui ne tirent de lautobiographie que les mauvais côtés, lesprit blog : ainsi, dans la seconde partie, les confessions des marins, sans aucun doute marquantes pour lauteure, ne sont pas très pertinentes replacées ici et ralentissent maladroitement le récit. De même, laspect notes de voyage jetées par-ci par là ne prennent pas toujours vraiment et scandent trop sévèrement un livre qui méritait un souffle plus continu.
On continuera malgré tout dapprécier ce dessin charmant et inspiré, ces petites douceurs graphiques qui, derrière une apparente simplicité recèlent une grande justesse dexpression et une précision sans faille. Ce trait noir et ces hachures empruntés au dessin dobservation, loin dêtre limités décrivent avec habileté le lever dun soleil, la chaleur dun après-midi ou loppression dun couloir de métro. Cest dans ces moments de pure caractérisation, là où lautobiographie sapproche de la simple évocation, que le livre touche à son but: nous montrer avec malice et modestie la possibilité dune île, dune autre vie.
Alexis Laballery ( Mis en ligne le 01/06/2009 ) Imprimer
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