| Xavier Coste Egon Schiele - Vivre et mourir Casterman - Univers d'auteurs 2012 / 18 € - 117.9 ffr. / 72 pages ISBN : 978-2-203-04778-5 FORMAT : 24x32 cm Imprimer
Egon Schiele fait partie des peintres majeurs de la Sécession, cette école viennoise du début du XXe siècle dominée par la personnalité de Gustav Klimt. Pourtant, lartiste traîne encore un léger parfum de souffre : son goût pour la nudité et des poses peu équivoques (on parle en son temps de pornographie), son trait brutal, réaliste qui met à nu les corps sans artifices, sans volonté dembellissement, qui les expose comme les transis médiévaux
Et puis une vie de bohème avec tous ses stéréotypes : lalcool, les dettes, les maîtresses, etc. Bref, lartiste génial et maudit dans toute sa splendeur, guetté par lembourgeoisement. Et un magnifique sujet pour un roman graphique : cest le sens de ce bel album réalisé par Xavier Coste qui explore, dans ce premier album prometteur, la vie et luvre de Schiele.
Car les deux sont inséparables : séducteur et amateur de femmes, Schiele est un amant plus que volage, dont les modèles sont rapidement des conquêtes. Un homme qui peint les femmes et la nudité par appétit autant que par recherche esthétique. Un révolutionnaire, qui naccepte pas létiquette pornographique, et entend révolutionner lart, en jouant sur la provocation, un précurseur autant quun écorché. Cest surtout un enfant incompris, le fils dun père trop tôt disparu, un artiste tendu par le désir de peindre, mais qui naccepte pas les conventions de son temps. En dépit de la protection de Klimt, les galeristes font la fine bouche, devant ses tableaux et il vit dexpédients. Son goût pour ses modèles lui attire des problèmes, un procès et même la prison. La guerre, à laquelle il échappe, le laisse de marbre, mais comme dautres, il néchappe pas à la mort des siens : ce face-à-face le transformera, avant de le tuer, à 28 ans, dune grippe espagnole qui fit des millions de morts.
Xavier Coste sest approprié Schiele, jusquà hommage réussi dessiner son histoire à la manière de son personnage : les visages, les allures, les poses, les coloris
on ressent jusque dans le graphisme une fascination pour un artiste vénéneux, au talent indéniable, mais qui nen sort pas forcément grandi. Lauteur sest surtout attaché à retracer un destin, une sorte de rébellion, et une maturation finale. Ce roman graphique se lit dune traite, comme un itinéraire, fait pour éclairer une uvre qui, encore aujourdhui, frappe par sa maîtrise et sa crudité. Un ouvrage très réussi, riche dimpressions, à destiner aux amateurs de peinture viennoise et à ceux que la vie dartiste fait toujours rêver.
Gilles Ferragu ( Mis en ligne le 18/06/2012 ) Imprimer | | |