|
Bande dessinée -> Humour |
| Collectif L’atelier Mastodonte Dupuis 2013 / 14.50 € - 94.98 ffr. / 128 pages ISBN : 978-2800153698 FORMAT : 16,0x21,5 cm
Auteurs: Lewis Trondheim, Alfred, Guillaume Bianco, Julien Neel, Cyril Pedrosa, Tebo, Yoann...
Illustration du fourreau: Enki Bilal Imprimer
Depuis 2011, le journal de Spirou propose une rubrique précieuse au bédéphile : Latelier Mastodonte met en scène une poignée dauteurs réunis le temps de double strips dans une même autofiction. Travaillant soi-disant sous le même toit, Pedrosa, Alfred ou Trondheim se répondent dune page à lautre, multipliant les gags et les vannes sympathiques. Cest drôle et réjouissant.
Au sein du journal Spirou, cette initiative perpétue une tradition ancienne, qui commença au sixième étage des éditions Dupuis dans les strips de Gaston et connut une de ses dernières incarnations dans les bureaux princiers de la Spirou Dream Team. Entre temps, le Gang Mazda, le Boss ou le 33 rue Carambole ont perpétué ces ateliers imaginaires, qui nous font passer de lautre côté de la création de façon plus fine que bien des documentaires. Les auteurs sy sont souvent frottés les uns aux autres, y compris quand la colocation était totalement virtuelle.
À la tête de cette communauté-ci, Lewis Trondheim. Lui qui était entré dans Spirou par la petite porte pour les rares aventures de Richard Mammouth, il y a vingt ans, est maintenant le pape de la bande dessinée et léminence grise du rédacteur en chef. Il reconstitue ici une bande qui rappelle un peu celle de lAssociation, ne serait-ce que dans la typographie du titre. Mais cette fois, Trondheim occupe une place centrale. Il lassume avec autodérision, mais on sent sa patte derrière toutes les interventions. Les siennes sont dailleurs bien les plus nombreuses, et souvent les plus efficaces.
À ses côtés, on remarque Guillaume Bianco, en jeune naïf maladroit, nhésitant pas à se ridiculiser pour mieux rivaliser avec le maître. Cest ensuite Tebo qui rejoint la fine équipe et accumule les sorties graveleuses, avec une bonne humeur constante. On retrouve aussi, parmi les résidents officiels, Alfred, Pedrosa, Julien Neel et Yoann, chacun pourvu de son propre gag récurrent.
Les auteurs réagissent aux récits des collègues, parfois sous la forme dune version alternative ou dune vengeance mesquine. Quand Alfred imagine lécolo Pedrosa auto-produisant ses aquarelles à partir de « caca mixé avec du colza et des bouts de tofu », tous les autres renchérissent en compliquant la situation initiale. Ainsi, le comique se double du plaisir de jongler avec les dessinateurs et les interprétations, en retrouvant au sujet de chaque anecdote des personnalités multiples.
Derrière le petit quotidien, on reconnaît les débats du milieu bande dessinée : les droits de Tintin, du Marsupilami, la réputation de Soleil sont évoqués, tandis quon croise Mbius encore vivant. Bien dans son temps, lAtelier Mastodonte se fait le témoin dune actualité en mouvement. Le festival dAngoulême 2012 occupe une grosse partie du recueil, avec des invités prestigieux : Bouzard, Buchet, Delaf, Ferroumont, Keramidas, Libon, Nob, Michel Plessix, Mathieu Sapin, Stan & Vince et Bastien Vivès. Mais on croise aussi Frantico, Frédéric Niffle, Gilles Ciment, Raoul Cauvin ou un collectionneur malhonnête du nom de Jack McHulott. Le portrait est vif et enlevé, mêlant satire, burlesque et humour cracra. On en redemande.
Les dernières planches accentuent encore le jeu entre les auteurs. Tebo lance une série de pastiches, dexercices de style et de décalquages qui virent au bazar le plus foutraque. Comme un OuBaPo aux contraintes réinventées à chaque page, comme un grand clin dil général.
Clément Lemoine ( Mis en ligne le 04/07/2013 ) Imprimer | | |
|
|
|
|