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Histoire & Sciences sociales -> Période Moderne |
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La (bonne) route des Indes | | | Olivier Ikor Caravelles - Le siècle d'or des navigateurs portugais JC Lattès 2010 / 23.90 € - 156.55 ffr. / 457 pages ISBN : 978-2-7096-3100-6 FORMAT : 14cm x 22,5cm
L'auteur du compte rendu : Hugues Marsat est agrégé d'histoire. Enseignant dans le secondaire, il mène parallèlement des recherches sur le protestantisme aux XVIe-XVIIe siècles. Imprimer
Paradoxalement, quand le lecteur a fini de lire Caravelles, il éprouve du mal à expliquer à son entourage ce quest exactement une caravelle et en quoi ce type de navire est un concentré de la technologie maritime de son temps, ayant permis aux Portugais et aux Espagnols daller à lautre bout du monde. Olivier Ikor peut bien ouvrir son propos en décrivant la laideur trompeuse de la caravelle, ce qui lintéresse cest la longue épopée des navigateurs portugais à partir de lavènement de la dynastie des Avis à la fin du XIVe siècle.
Longue ne constitue pas le moindre des qualificatifs pour cette histoire. Un simple résumé des différentes étapes retracées par latlas et la chronologie en annexes donne une idée du rythme de lexploration et de son étendue : les îles de Madère, du Cap-Vert et de Sao-Tome-et-Principe en 1418, 1455 et 1471 ; le Cap de Bonne Espérance en 1488 et Calicut en Inde dix ans après ; Malacca conquise en 1511 ; lAustralie peut-être effleurée et le Japon abordé quelques années avant le mitan du siècle et vingt après quun autre Portugais, traître involontaire à sa patrie parce que débouté par son roi, initie la première circumnavigation au service du rival espagnol.
Méticuleusement, Olivier Ikor, lusophile patenté, qui a élu domicile à Lisbonne doù il écrit ses livres, essentiellement des romans, suit le chemin des caravelles, expédition après expédition, cherchant à remplir les blancs de la chronologie, souvent attribués au secret entourant les voyages, notamment sous le règne du roi Jean II (et non pas João II parce que cela implique trop de manipulations informatiques !), mais aussi parfois parce que la couronne a laissé la bride à ses marchands, plus intéressée quelle était par ses ambitions marocaines ou espagnoles et ses projets de croisade. Peut-être aussi parce que le tremblement de terre de 1755 a largement détruit les archives, obligeant lhistorien à sappuyer beaucoup sur des chroniqueurs qui tiennent souvent des panégyristes.
Lauteur de Caravelles sait lui faire preuve desprit critique et danalyse, nhésitant pas à se moquer des théories farfelues et à poser des hypothèses, comme la découverte du Brésil antérieure à son annonce officielle en 1500. En cela, il semble sappuyer sur lhistoriographie portugaise et prend parti pour les tenants de la minoration du rôle dHenri le Navigateur dans ces voyages. Son utilisation du Polyptique de Saint-Vincent, admirable par le lecteur dans le cahier iconographique central entre deux planisphères, illustre bien toutes ces qualités.
Elle en montre aussi les défauts, car Olivier Ikor est un autre Alexandre Dumas qui nhésite pas à combler les lacunes par une romance clairement annoncée mais tellement convaincante et bien troussée que le lecteur ne sait pas toujours très bien quand elle sarrête, ni si le détail est vrai ou ressort de limagination. Un jeu un peu dangereux, surtout sur le sujet des découvertes quand on pense au précédent créé par Gavin Menzies et son 1421. Heureusement, le globe-trotter qua été Olivier Ikor évolue dans un sujet aux bornes lointaines mais claires. Même sil a la comparaison parfois anachronique, qui nhésite pas à sauter les siècles, à limage de sa verve qui ne dédaigne pas, loin de là, les envolées lyriques. Le chant nostalgique du fado est peut-être en gestation dans la bouche des marins de Caravelles, pas dans son ton.
Regrettons cependant, non sans la malhonnêteté intellectuelle de celui qui aurait boudé un véritable plaisir de lecture, que le poète quest lauteur prenne le pas sur lhistorien universitaire quil nest pas et préfère citer les Luisiades de Camoes en bibliographie plutôt que les ouvrages, mêmes portugais, quil a dû utiliser, car, bien quaccessible au grand public, Caravelles contribue à combler une lacune sur une question où les Grandes Découvertes espagnoles occupent lessentiel de lédition dhistoire sur ce sujet.
Hugues Marsat ( Mis en ligne le 24/08/2010 ) Imprimer | | |
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