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Histoire & Sciences sociales -> Période Moderne |
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Au commencement était le Verbe… | | | Claude Postel Traité des invectives - Au temps de la Réforme Les Belles Lettres 2004 / 37 € - 242.35 ffr. / 500 pages ISBN : 2-251-44254-5 FORMAT : 14x23 cm
L'auteur du compte rendu : Hugues Marsat, agrégé d'histoire, est enseignant dans le secondaire. Il mène parallèlement des recherches sur le protestantisme aux XVIe-XVIIe siècles. Imprimer
Jacques Solé a en son temps étudié les conditions du débat polémique entre protestants et catholiques, forme policée, intellectuelle, de laffrontement qui satisfait la perception de lécrit, entretenue par notre société au moins depuis la Seconde Guerre mondiale, celle dun champ où se réfugient les combattants persuadés que la violence nest pas la solution. Cétait oublier que les mots sont aussi porteurs de haine, quils annoncent ou accompagnent la violence. Avec ce Traité des invectives, Claude Postel sintéresse à cette autre dimension de laffrontement entre catholiques et protestants en étudiant linvective, définie comme l«expression injurieuse, discours violent ou grossier, apostrophe véhémente» (p.12), telle quon peut la rencontrer au travers des textes polémiques parus jusquau décès du duc dAnjou en 1584, qui fait dHenri de Navarre, lhéritier de la couronne, concrétisant la division au sein des catholiques français.
De fait, les écrits ne peuvent être séparés du contexte dans lequel ils sont rédigés. Aussi Claude Postel commence-t-il par les replacer dans la chronologie afin de mieux souligner ce quil appelle le crescendo de la tension, première partie du Traité, de loin la plus volumineuse. Sappuyant sur le dépouillement soigné dune riche bibliographie, lexercice parfois fastidieux conduit dune part à retrouver dans la diatribe la perception des événements quentretiennent les auteurs ; dautre part à suivre lévolution du ton du débat scripturaire, le tout à partir dabondantes citations.
La deuxième partie savère plus réjouissante et lauteur, plus à son aise mais, faute dune exhaustivité impossible, se présente comme une brève synthèse des thèmes traités ainsi que de la rhétorique employée. Après avoir distingué les cibles de la polémique, Claude Postel sattache à en examiner méthodiquement les armes le plus fréquemment tirées dun véritable bestiaire méthodiquement analysé jusque dans ses références bibliques. Les pères du Concile de Trente deviennent alors des «babouins qui nont nulle vergogne» sous la plume de Calvin (p.345) tandis que Jean de Léry qualifie les huguenots de «boucs ords (i.e. sales ou honteux) et infâmes» (p.346). Enfin, larsenal sachève sur les références lexicales au corps humain avec lequel le XVIe siècle entretient une relation ambiguë et les polémistes, dénués de la pudeur de notre époque, de dénoncer leur pestilence réciproque mais aussi dexposer la cruauté du conflit par le récit des atrocités commises, quune gravure déviscération suffira à faire percevoir (p.379).
Sil offre une vision intéressante et différente des conflits religieux du XVIe siècle, le Traité des invectives au temps de la Réforme nest pas de ces livres faciles à lire. Il tient davantage de loutil historiographique par le nombre et la qualité de ses références bibliographiques rendues plus facilement utilisables grâce à un index des auteurs et des imprimeurs, comme par la présence dun précieux glossaire des mots les plus significatifs remis dans leurs contextes littéraires, histoire de se rappeler qui a dit quoi de qui
Hugues Marsat ( Mis en ligne le 21/04/2004 ) Imprimer
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