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Histoire & Sciences sociales -> Période Contemporaine |
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Un rêve tragiquement avorté | | | Pierre Milza ''L'Année terrible'' - Tome 2 - La Commune, mars-juin 1871 Perrin - Pour l'Histoire 2009 / 24 € - 157.2 ffr. / 514 pages ISBN : 978-2-262-03073-5 FORMAT : 15,5cm x 24cm
L'auteur du compte rendu : Agrégé, Pierre Triomphe vient de soutenir une thèse sur «Les mises en scène du passé au Palais-Bourbon (1815-1848). Aux origines dune mémoire nationale». Il a publié LEurope de François Guizot (Privat, 2002). Imprimer
La Commune, mars-juin 1871 constitue le deuxième et dernier tome de LAnnée terrible de Pierre Milza. Comme le précédent, portant sur la guerre de 70, ce volume propose une vision synthétique, appuyée sur des sources de seconde main, de ces quelques mois despoirs et dillusions, qui sachèvent par une répression impitoyable.
Si quelques pages sont consacrées aux vaines tentatives de mises en place de communes provinciales, lauteur sintéresse pour lessentiel au mouvement parisien, dune toute autre ampleur. Lélection dune Assemblée monarchiste qui sinstalle à Versailles, labandon par la France de lAlsace-Lorraine à la suite de la défaite contre lAllemagne et la formation dun gouvernement Thiers soupçonné à tort de vouloir restaurer les Orléans sur le trône, suscitent lire dune population parisienne dont le républicanisme et le patriotisme ont été exacerbés par les souffrances endurées lors du conflit. Ce contexte favorise linsurrection du 18 mars qui débouche sur lévacuation de la capitale par les troupes fidèles au gouvernement. La Commune sétablit officiellement après les élections du 26 mars, qui prouvent ladhésion initiale dune partie importante de la population parisienne.
Pierre Milza souligne, à la suite de William Sernam, lhétérogénéité idéologique des élus communalistes, quil serait réducteur de ramener à une opposition entre héritiers archaïques des premiers mouvements révolutionnaires et précurseurs en avance sur leur temps des révolutions prolétariennes. Plus que les divergences, dont il ne faut pas surestimer limportance, entre jacobins et néo-jacobins, socialistes de diverses tendances, blanquistes ou internationalistes, cest labsence dune direction forte qui explique léchec dune Commune profondément empreinte desprit libertaire. Le pouvoir des élus est par ailleurs restreint par la volonté dinstaurer une démocratie directe, notamment au sein des forces armées. Pierre Milza retrace les aspirations dégalité sociale et de fraternité des Communards, pour lesquels il manifeste clairement sa sympathie. Il propose une analyse sociologique des acteurs du mouvement, inspirée par les travaux de Jacques Rougerie, et esquisse le portrait de diverses personnalités attachantes, issues dun monde ouvrier traditionnel plus que du nouveau prolétariat en voie de constitution, à linstar dEugène Varlin, qui exerce la profession de relieur. Il sintéresse particulièrement aux militantes féminines, souvent issue de classes plus aisées, comme Elisabeth Dmitrieff ou Anna Vassilievna Kornine-Krukovkaiai, deux féministes originaires de Russie.
La succession des opérations militaires, qui tournent toutes au désastre pour les Parisiens en dépit des difficultés dorganisation des Versaillais, débouche sur la reprise de la capitale à la suite de la «Semaine sanglante», accompagnée de multiples exécutions sommaires de Communards par les Versaillais, et suivie par une sévère répression judiciaire. Si Pierre Milza sinspire largement dans la description des combats des analyses de Robert Tombs, il conteste le bilan de quelque 10.000 morts proposé par lauteur anglo-saxon, retenant les chiffres de 20 à 30.000 morts pour la plupart sommairement exécutés avancés notamment par Lissagaray et Jacques Rougerie. En dépit de lanachronisme de lappellation, lauteur tient dans sa conclusion à qualifier cette répression sanglante de crime contre lhumanité, ce qui najoute pas grand-chose à la compréhension dexactions dont les responsabilités restent obscures.
Même si lon peut regretter que louvrage ne sintéresse guère aux répercussions de la Commune en-dehors de Paris, et à sa contribution paradoxale à linstallation de la République en France, et quil ne renouvelle guère lhistoriographie de cet ultime avatar de la guerre franco-française inaugurée en 1789, il savère cependant intéressant par sa clarté dexposition, sa riche iconographie et les divers documents qui lillustrent.
Pierre Triomphe ( Mis en ligne le 15/12/2009 ) Imprimer
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