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Histoire & Sciences sociales  ->  Période Contemporaine  
 

Combattants mal connus
Eric Baratay   Bêtes des tranchées - Des vécus oubliés
CNRS éditions - Le passé recomposé 2013 /  22 € - 144.1 ffr. / 255 pages
ISBN : 978-2-271-07436-2
FORMAT : 15,0 cm × 23,0 cm

L'auteur du compte rendu : administrateur territorial, agrégé d’histoire et diplômé en Etudes stratégiques, Antoine Picardat a enseigné dans le secondaire et en IEP, et travaillé au ministère de la Défense. Il est aujourd’hui cadre en collectivité territoriale.
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La Première Guerre mondiale fut avec 64 millions de mobilisés dans l’ensemble des pays belligérants, la première guerre de masse. Elle fut également la première guerre industrielle et totale, donc, dans un certain sens, la première guerre de l’ère moderne. Mais elle fut également, elle fut encore, une guerre traditionnelle, à l’ancienne, dans laquelle les animaux furent massivement engagés. Cette réalité était bien connue des sociétés dans lesquelles les bêtes étaient réquisitionnées ou achetées, mais elle a été largement oubliée depuis.

Pourtant, derrière les Taxis de la Marne, les camions de la Voie sacrée, les avions de Guynemer et de von Richthofen, les gaz et les sous-marins, quantité d’animaux servirent, vécurent, souffrirent et moururent au côté des hommes dans toutes les armées. Les plus nombreux furent les millions d’équidés, utilisés pour la cavalerie, le trait ou le bât. Viennent ensuite les quelque cent-mille chiens de trait, chiens de guet, chiens messagers ou chiens sanitaires ; des dizaines de milliers de pigeons voyageurs et un nombre incalculable d’animaux de compagnie : chiens encore, chats, lapins, oiseaux, etc., immatriculés ou pas, qui partagèrent le quotidien des combattants. Si l'on ajoute les rats, les poux, les mouches et les puces, dont le souvenir est bien associé à la «guerre des tranchées» et qui partagèrent aussi à leur exaspérante manière le quotidien des hommes, ou les mascottes, jusqu’aux plus exotiques comme un lion, des gazelles, des kangourous ou des chameaux, amenés par des unités des empires britannique ou français, se dessine l’image d’une guerre qui rappelle un peu l’Arche de Noé et qui sent davantage le fumier que l’essence.

Le livre d’Eric Baratay s’inscrit dans un courant de redécouverte de cette réalité. A l’aube d’un centenaire commémoratif dans lequel les aspects convenus et déjà vus s’annoncent en nombre, son propos est de considérer les animaux comme des sujets de la guerre, non comme des objets, qui ne seraient abordés que sous un angle militaire, logistique ou technique. Il s’appuie pour cela sur les témoignages des contemporains, notamment les combattants comme Genevoix, Remarque, Jünger et beaucoup d’autres, qui mentionnent ou décrivent la présence ou le destin d’animaux. Les rapports de vétérinaires, souvent écrits après-guerre, sont également une source importante. Spécialiste des rapports entre l’homme et les animaux, déjà auteur de plusieurs ouvrages sur ce thème, Eric Baratay utilise également la zoologie et l’éthologie. En 220 pages précises et synthétiques, il fait ainsi revivre le quotidien des bêtes des tranchées, de l’enrôlement à la mort ou à la démobilisation. Sans jamais tomber dans l’anthropomorphisme, sans sensiblerie ni mépris, sans essayer d’attribuer aux animaux des sentiments humains, il les considère comme des sujets dotés de sensibilité et capables de l’exprimer. Il parvient ainsi à brosser un tableau général des vécus animaux, en y apportant les nécessaires distinctions et différenciations entre espèces et entre armées.

Sans surprise, il ressort de ce livre que la guerre fut pour les animaux comme pour les hommes une épreuve terrible, qui leur infligea d’immenses souffrances et en tua proportionnellement bien plus que de soldats. En s’intéressant aux animaux, Eric Baratay rejoint également les approches historiographiques attentives à l’expérience combattante et à la guerre vécue. Au fil des pages, il fait apparaître les sentiments des hommes à l’égard de leurs compagnons de combat, allant de l’indifférence, voire de la cruauté, à la compassion et à l’affection. Dès le lendemain de la guerre, les anciens combattants furent d’ailleurs nombreux à demander à ce que la mémoire des animaux soit également honorée. Elle le fut de manière variable selon les pays, mais toujours modestement et discrètement, comme pour les pigeons et les chiens. Curieusement, les chevaux furent longtemps oubliés et il a fallu attendre les années 2000, avec un monument à Hyde Park ou encore le roman de Michael Morpurgo, Cheval de guerre, adapté par Spielberg en 2011, pour que cette injustice commence à être réparée.


Antoine Picardat
( Mis en ligne le 19/11/2013 )
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