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Histoire & Sciences sociales -> Période Contemporaine |
| Louis N. Panel Gendarmerie et contre-espionnage (1914-1918) Service historique de la Gendarmerie nationale 2004 / 18 € - 117.9 ffr. / 250 pages ISBN : 2-11-092359-8 FORMAT : 16x24 cm
L'auteur du compte rendu : Etudiante en histoire, Thérèse Krempp termine cette année un DEA à l'Ecole des hautes études en sciences sociales sur l'armée française d'Orient pendant la Première Guerre mondiale. Avec Jean-Noël Grandhomme, elle a publié Charles de Rose, pionnier de l'aviation de chasse (éditions de la Nuée Bleue, septembre 2003).
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Jeune chercheur au Service historique de la Gendarmerie nationale, Louis N. Panel sintéresse dans son ouvrage préfacé par Jean-Jacques Becker à un sujet largement mis de côté par les historiens jusquà la fin des années 1990 : le rôle et laction de la gendarmerie pendant la Première Guerre mondiale. Ce désintérêt est dû en grande partie au rôle ambigu des gendarmes : militaires de métier, ils ne participent pas aux opérations et conservent leur mission de surveillance du territoire, à larrière comme sur le front. Lauteur a choisi de limiter son étude à la lutte de la gendarmerie contre lespionnage, lune des missions les plus particulières de ces «oubliés de la Grande guerre». Cela nous permet cependant davoir un bon aperçu sur le fonctionnement général de la gendarmerie durant cette période. Louis N. Panel complète son travail par quelques exemples biographiques qui donnent ainsi un fil conducteur à la description du service gendarmique.
Dans une première partie consacrée à lorganisation générale de lespionnage, lauteur rappelle que la lutte contre lespionnage est dévolue, depuis le début de la Troisième République, à la gendarmerie. Sa mission de surveillance du territoire la rend en effet tout naturellement apte à remplir cette fonction. Lentrée en guerre et lavancée rapide de larmée allemande sur le territoire français marquent une période de bouleversements et de tâtonnements dans son organisation car elle nétait pas préparée à linvasion allemande, ni à lenlisement des combats dans les tranchées. La gendarmerie souffre aussi dun manque deffectifs, qui la déstabilise pendant un temps. Mais une fois le front stabilisé, des directives précises en matière de contre-espionnage sont données aux gendarmes.
Lauteur passe ensuite en revue le déroulement classique des missions de contre-espionnage, de la prévention au jugement, en passant par la recherche des suspects et linterpellation. Elément principal de prévention, la surveillance de la circulation, des populations, des équipements et des frontières est bien sûr dune importance capitale. Particulièrement lourde et délicate, car il ne faut pas entraver les communications, cette mission est assez impopulaire aux yeux des civils et des combattants. Les gendarmes doivent de plus traquer tout «suspect», notion éminemment subjective car elle englobe toute personne qui attire lattention ou éveille la méfiance. Ces suspects, pour la plupart des femmes, des étrangers ou même des militaires déguisés, sont souvent désignés par les civils (ce qui donne dailleurs lieu, au début de la guerre, à une véritable épidémie «despionnite» au sein de la population française), à charge ensuite pour le gendarme de vérifier la véracité des soupçons. Responsable de larrestation et de linterrogatoire des suspects despionnage, le gendarme est présent tout au long de la procédure qui mène au jugement : internement, transfert éventuel, application des sanctions après le jugement. Cest lui aussi qui surveille lévacuation vers larrière, sanction préventive qui ne donne pas lieu à un procès. Sa participation à la procédure judiciaire sarrête cependant si lespion est reconnu coupable et condamné à mort, car il est interdit aux gendarmes de prendre part à une exécution.
La troisième partie de louvrage est consacrée aux relations entre la gendarmerie et ses interlocuteurs, civils et militaires. Cette coopération se fait à tous les niveaux, du notable local au service de la Sûreté, du soldat aux états-majors. Entre la gendarmerie et la Sûreté, la collaboration donne lieu à de nombreux différents et altercations dus à une rivalité de compétence. Par ailleurs le gendarme est très mal vu de la troupe qui ne retient que la partie répressive de son service et le considère comme un «planqué». Marginalisée au sein de la sphère militaire, la gendarmerie est amenée à se forger une forte identité, qui se traduit pendant la guerre par un esprit de corps particulièrement renforcé. Laprès-guerre oblige la gendarmerie à un travail de mémoire long et difficile : seule la lutte contre lespionnage a permis que le rôle de la gendarmerie et le dévouement de ses hommes ne sombrent pas dans loubli.
Louis N. Panel nous propose ici une bonne étude qui permet de réhabiliter et de faire connaître le rôle important de la gendarmerie pendant la Première Guerre mondiale, gendarmerie qui fut lun des rouages essentiels de la machine de guerre. Il sappuie sur des sources nombreuses et bien exploitées, que ce soit celles du Service historique de larmée de terre ou du Service historique de la gendarmerie nationale, sans oublier les travaux les plus récents dautres historiens.
Thérèse Krempp ( Mis en ligne le 28/06/2004 ) Imprimer
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