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Histoire & Sciences sociales -> Période Contemporaine |
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Marseille, de la porte de l’exil à l’occupation nazie sans pitié | | | Renée Dray-Bensousan Les Juifs à Marseille - (1940-1944) Les Belles Lettres - Histoire 2004 / 25 € - 163.75 ffr. / 474 pages ISBN : 2-251-38066-3 FORMAT : 15x21 cm
L'auteur du compte rendu : Éric Alary, agrégé dhistoire, docteur ès Lettres de lIEP de Paris (sa thèse sur la ligne de démarcation a été publiée en 2003 chez Perrin), est professeur en Lettres Supérieures et en Première Supérieure au lycée Camille Guérin de Poitiers. Imprimer
Hitler avait des mots très durs pour parler de la cité phocéenne et prétendait quelle était «le chancre de lEurope, lasile de la pègre internationale.» Aussi, lAllemagne nazie a-telle décidé de détruire les quartiers nord du Vieux-Port, à partir du 22 janvier 1943. Pour autant, Marseille na connu loccupation allemande quà partir du 12 novembre 1942. Jusquà cette date, les juifs trouvaient à Marseille laide de lAmerican Joint Committee, lHicem, notamment pour senfuir hors dEurope. Loccupation allemande a été une rupture, ajoutée aux premières mesures dexclusion et de persécution antisémites prises par le régime de Vichy.
Spécialiste de lhistoire des années noires et de lhistoire des femmes, Renée Dray-Bensousan aborde lhistoire des juifs de Marseille dans les années noires et complète de façon fort pertinente les études antérieures. Non seulement elle donne une approche neuve de lhistoire de Marseille pendant la Seconde Guerre mondiale, mais elle décortique aussi la politique antijuive du régime de Vichy et des Allemands à partir dune étude de cas remarquable par bien des aspects. Elle sappuie sur des sources abondantes tant écrites quorales, sans oublier un bon appareil critique et une bibliographie raisonnée que les spécialistes des années noires apprécieront. Lhistoire de la zone non occupée est ainsi très enrichie ; lauteur montre les compromissions du régime de Vichy. Mais elle confirme aussi dautres thèses universitaires antérieures sur la politique répressive autonome du régime de Pétain en zone occupée et notamment à Paris. En effet, les études sur la zone non occupée étaient plus pauvres. Plus encore, lhistorienne complète amplement notre compréhension des mécanismes et des conséquences de laryanisation économique.
Louvrage, issue dune thèse de doctorat, suivant un plan chronologique, découpé en trois parties, permet daborder successivement la question de la «judaïcité» entre août 1939 et juin 1941, puis lexclusion et la marginalisation de juin 1941 à août 1942, enfin les spoliations et les persécutions de lété 1942 au mois daoût 1944.
Pas à pas, nous suivons toutes les étapes de la discrimination à Marseille, ce qui permet de comprendre aussi une certaine spécificité de la persécution antijuive en zone sud. En 1939, Marseille comptait 10000 juifs. Dabord, on comprend que bien avant larrivée des Allemands, les juifs sont des cibles de lexclusion avec le statut doctobre 1940, puis avec le recensement et les premières mesures de rejet dès juin 1941. Le Commissariat général aux questions juives avait été créé quelques semaines auparavant. Un état des lieux de la communauté juive est fait et il montre les différences avec la judaïcité à Paris. Marseille devient une plaque tournante de lexil et un lieu de refuge pour des milliers de fugitifs et de persécutés de toute lEurope. En août 1942, les premiers juifs étrangers sont expédiés au camp des Milles. Laryanisation économique connaît un essor considérable sous laction de Darquier de Pellepoix. Lauteur parvient à nous faire comprendre un processus assez complexe grâce à une écriture efficace. Lannée 1943 est la plus terrible avec des rafles massives qui succèdent à lévacuation du Vieux-Port. Les SS, aidés par les policiers français, vérifient 40000 identités et arrêtent près de 2000 personnes, juives pour lessentiel. 1642 sont envoyées directement à Compiègne, lantichambre des camps dextermination nazis. 20 000 Marseillais sont obligés de quitter le Vieux-Port dont les logements sont pillés - et sont dirigés vers le camp de Caïs dans lequel aucun hébergement na été prévu. Du 1er au 17 février, plus de 1490 immeubles explosent après avoir été minés par les Allemands.
Dans louvrage, on voit les subterfuges utilisés par ceux qui ont tenté de sauver les juifs effrayés par les ravages de lantisémitisme, notamment avec laide des filières clandestines. Au total, sur 75000 juifs arrêtés en France, 4000 lont été dans Marseille et sa région. Marseille a connu une répression de plus en plus radicale.
Louvrage est complété par une liste des sigles et abréviations, une préface de Jean-Marie Guillon, des tableaux statistiques, des graphiques, un index.
Eric Alary ( Mis en ligne le 15/07/2004 ) Imprimer
A lire également sur parutions.com:Vichy, les Juifs et les Justes de Jacques Fijalkow , collectif Histoire des Juifs de France de Philippe Bourdrel | | |
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