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Histoire & Sciences sociales  ->  Historiographie  
 

L’invention du patrimoine préhistorique
Arnaud Hurel   La France préhistorienne de 1789 à 1941
CNRS éditions 2007 /  28 € - 183.4 ffr. / 281 pages
ISBN : 978-2-271-06600-8
FORMAT : 15cm x 23cm

L'auteur du compte rendu : Agrégé, Pierre Triomphe vient de soutenir une thèse sur «Les mises en scène du passé au Palais-Bourbon (1815-1848). Aux origines d’une mémoire nationale». Il a publié L’Europe de François Guizot (Privat, 2002).
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La loi Carcopino de 1941 qui fixe pour plus d’un demi-siècle le statut des chantiers archéologiques en France et par voie de conséquence contribue à la naissance de la profession de préhistorien est le fruit d’une longue maturation. Arnaud Hurel en retrace la genèse dans son ouvrage sur La France préhistorienne de 1789 à 1941.

En effet, l’adoption de cette loi met un terme à de longs débats aux enjeux divers. Les discussions ont notamment porté sur le droit de propriété, puisqu’il s’agissait de savoir dans quelle mesure l’Etat pouvait astreindre à des servitudes les terrains de particuliers, et à qui devait revenir les découvertes. Le texte de Jérome Carcopino se rattache par ailleurs aux débats portant sur le patrimoine national, notion forgée lors de la Révolution française, au moment même où le vandalisme révolutionnaire semble mettre en péril les œuvres d’art et les monuments du passé historique. La loi de 1941 fait ainsi suite à une série de textes antérieurs visant à protéger les monuments historiques. La première étape essentielle se déroulant sous la monarchie de Juillet, où sous l’impulsion de François Guizot est créée l’inspection des monuments historiques, où s’illustra longuement Prosper Mérimée. Enfin, la loi s’inscrit dans le cadre de la découverte d’une apparition de l’humanité plus précoce que ce qu’on avait cru jusque-là, ce qui remettait en cause le texte biblique fixant la création de l’homme vers 4004 avant Jésus-Christ, et obligeait à s’appuyer sur de nouvelles méthodes pour appréhender un passé sur lequel les documents écrits étaient muets. La question des chantiers archéologiques est en effet profondément liée à «l’invention de la préhistoire», à sa progressive institutionnalisation et affirmation comme champ de savoir spécifique, analysée de façon plus globale dans l’ouvrage de Nathalie Richard, Inventer la préhistoire. Les débuts de l’archéologie préhistorique en France (Vuibert, 2008).

Amateurs et collectionneurs sont à l’origine de découvertes majeures mais, le temps passant et les méthodes de fouille se complexifiant, ils sont de plus en plus souvent tenus pour responsables du saccage de nombreux sites. Ces passionnés, souvent membres de sociétés savantes parfois rivales, et attachés à la liberté individuelle, entretiennent des relations complexes avec l’appareil d’Etat. Ils cherchent à attirer son attention et sa sollicitude, surtout dans un premier temps. Mais par la suite ils redoutent de plus en plus des interventions liberticides qui risqueraient de brider la liberté du fouilleur privé, au fur et à mesure que s’affirme le projet d’une progressive prise en charge de l’archéologie préhistorique par l’Etat français. D’autres enjeux, plus ponctuels, apparaissent ici ou là, comme le nationalisme agressif qui s’exprima au début du XXe siècle à l’occasion de l’affaire Hauser, un chercheur helvète qui prospecte le Périgord à la Belle Époque et revend une partie de ses trouvailles à des musées allemands. A cette occasion, le débat trouve un large écho dans l’opinion publique, notamment à travers des articles de presse dénonçant ce «brave Teuton, qui se dit Suisse […] venu accaparer […] nos richesses souterraines».

On peut regretter que les perspectives diachroniques soient parfois masquées par le souci d’analyser en détail chacun des temps forts législatifs qui scandent ces 150 ans d’histoire. Cependant, l’ouvrage, appuyé sur de nombreux témoignages et pourvu d’un index utile, permet de mettre en valeur certains aspects de la personnalité et des réseaux qui entourent des figures hautes en couleur comme les frères Salomon et Théodore Reinach, Gabriel et Adrien de Mortillet. Il apporte également un éclairage intéressant sur les enjeux multiples qui entourent l’élaboration de textes législatifs qu’on aurait pu penser très techniques et peu sujets à controverses, et sur la formation de la science archéologique.


Pierre Triomphe
( Mis en ligne le 07/04/2009 )
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