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Pas une ride !
José Saramago   Le Cahier
Le Cherche Midi 2010 /  18 € - 117.9 ffr. / 243 pages
ISBN : 978-2-7491-1621-1
FORMAT : 14,3cm x 22,1cm

Préface d'Umberto Eco

Traduction de Marie Hautbergue

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A quatre-vingts ans passés, José Saramago ne s'est pas endormi sur son prix Nobel. Le grand homme de la littérature portugaise n'en a pas fini avec l'écriture, et le vieux monsieur, loin de s'en tenir à la posture classique du sage retranché dans ses quartiers de Lisbonne et Lanzarote, s'est laissé convaincre de tenir un blog, dans lequel il exprime au jour le jour ses réflexions quotidiennes sur l'actualité et l'état du monde. Ce Cahier est la compilation des chroniques rédigées entre septembre 2008 et mars 2009, et publiées sur Internet à l'intention de ses lecteurs.

Pour qui ne connaissait l'écrivain que par la lecture de ses romans, la surprise est de taille ! Car rien de commun à première vue, entre ses romans, quasiment dénués de ponctuation, et ces articles où interrogations et exclamations jaillissent de façon jubilatoire, révélant une capacité d'indignation que l'âge ne semble guère avoir émoussée.

L'écrivain profite en effet de cette tribune moderne, d'abord pour s'insurger contre un monde qui ne tourne décidément pas rond. En communiste qui n'a jamais renié ses engagements, il critique le capitalisme mondialisé et n'hésite pas à crier sa haine de Bush, «un crétin», de Berlusconi, «un délinquant», ou encore de Sarkozy, «un hypocrite» ; en anticlérical qui n'a rien perdu de sa verve, il s'en prend à toutes les formes de religion et à leur visible et menaçante résurgence ; en humaniste convaincu, il réaffirme son refus, encore et toujours, de l'injustice, où qu'elle puisse se trouver.

D'aucuns pourront voir une forme de naïveté dans ces colères récurrentes, certains cyniques les jugeront même un peu convenues. D'autres y verront la volonté de prouver que le temps et les honneurs ne l'ont pas porté vers la résignation, bien au contraire. A tel point que ses propos peuvent parfois frôler le politiquement incorrect : ainsi lorsque pour fustiger la politique d'Israël à l'encontre des Palestiniens il affirme : «nous comprenons mieux le dieu biblique quand nous connaissons ceux qui le suivent» (p.154), bien qu'il ne s'agisse là sans doute que d'une autre expression de son anticléricalisme forcené, il prend le risque d'être taxé, au mieux de gâtisme prononcé, au pire d'antijudaïsme...

Cependant, si la politique le rend colérique, la littérature reste le champ non limité de ses coups de coeur : on notera les fréquentes allusions aux poètes et écrivains qu'il admire encore avec une grande humilité, Borgès d'abord, Pessoa bien sûr, mais aussi Jorge Amado, Eduardo Lorrenço, Carlos Fuentes et bien d'autres.

Quel lien alors entre ces écrits lâchés comme des paroles débordantes, et ses romans, connus pour leur pondération, la subtilité de leurs métaphores et la toujours très grande distance de leur narrateur ? Quel rapport entre le blogueur indigné et le romancier, qui avait justement fait de la destruction de la ponctuation un procédé stylistique permettant au lecteur d'appréhender le monde créé par l'auteur sans passer par le truchement d'un quelconque jugement du narrateur ?

Dans une très belle préface, Umberto Eco propose une réponse à ces questions : ce sont ces fureurs, ces regards critiques portés sur le monde, qui permettent ensuite de donner matière aux romans, dans lesquels tout est fait au contraire pour laisser le lecteur libre de leur interprétation.

Pari doublement réussi lorsque le roman devient à son tour une référence pour commenter l'actualité ! Et il est touchant de lire Saramago s'en émouvoir lui-même dans sa chronique du 10 février 2009, lorsque relatant la libération de Sigifredo Lopez, député colombien séquestré pendant sept ans par les Farc, il écrit : «(...)je n'ai pas pu m'empêcher d'éclater en sanglots lorsque Sigifredo, pour exprimer son infinie gratitude à Piedad Cordoba, l'a comparée à la femme du médecin de L'Aveuglement» (p.203). Ou comment la littérature, même quand elle n'est pas à proprement parler qualifiée «d'engagée», reste un des outils fondamentaux pour l'appréhension et la compréhension du monde.


Natacha Milkoff
( Mis en ligne le 19/02/2010 )
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