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Sciences, écologie & Médecine -> Ecologie & nature |
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Le christianisme est écologiste mais les chrétiens le sont-ils ? | | | Hélène Bastaire Jean Bastaire Pour une écologie chrétienne Cerf 2004 / 13 € - 85.15 ffr. / 88 pages ISBN : 2-204-07458-6 FORMAT : 14x20 cm
Lauteur du compte rendu : Rémi Luglia, professeur agrégé dHistoire et interrogateur en deuxième année dans une classe préparatoire commerciale, est doctorant à Sciences-Po Paris où il mène une recherche sur lhistoire de la protection de la nature en France de 1854 à nos jours à travers le mouvement associatif. Imprimer
Ce livre est indéniablement un plaidoyer chrétien. Nombreux sont les écologistes «officiels» qui imputent au christianisme et à ses diverses Églises les dérives de lhumanité en matière de gestion écologique et durable de la planète et de sa biodiversité. Ils lui reprochent surtout, cest leur idée, davoir mis lHomme au centre du monde et davoir conceptualisé ce monde au profit exclusif et personnel de lêtre humain. Ah ! Quil est loin ce temps où lhomme vivait en harmonie totale avec la Nature !
Le seul hic est que ce temps na jamais existé, ou du moins quil na jamais été historiquement prouvé, sauf, si lon est chrétien, au Paradis originel, celui davant la Faute. Hélène et Jean Bastaire soulignent demblée quau cur de la Bonne Nouvelle chrétienne, il y a lespérance en un au-delà que lon peut qualifier, au vu de sa description et pour ce qui nous intéresse ici, décologique. Lécologisme ferait donc partie intégrante de la foi chrétienne.
En se fondant sur cette première constatation (que lon peut contester dailleurs : si lau-delà «écologique» est lespoir, nest-ce pas parce quil est considéré comme irréalisable sur Terre ?), les auteurs vont développer une démonstration minutieusement ciselée, excellemment documentée par les références constantes aux sources de la foi chrétienne, que sont les Évangiles et les Pères de lÉglise, ancrée dans lhistoire spirituelle, intellectuellement très stimulante, que lon soit croyant ou non. On peut donc rendre hommage aux auteurs davoir su rendre aussi intelligible leur mystique écologique chrétienne.
Hélène et Jean Bastaire sont bien placés pour nous en parler. Fervents croyants, ils allient une écriture riche, agréable et inspirée à leur fine connaissance des Évangiles et des Pères. Cette foi et - cest leur synthèse personnelle - lancrage de celle-ci dans leurs convictions écologistes, est expliquée par les auteurs. Leur idée directrice est simple :
- le christianisme nest pas porteur de la domination de lHomme sur la nature,
- cest la déchristianisation de la société durant les derniers siècles, qui a accéléré le massacre de la planète.
Leur démonstration part de lÉcriture sainte, source de la foi chrétienne. La Genèse, les Épîtres et surtout lapôtre Marc viennent létayer. Nous citerons simplement lordre du Christ aux apôtres, rapporté par ce dernier : «Allez par le monde entier, proclamez lÉvangile à toutes les créatures» (Marc, 16, 15). Ce «toutes les créatures» est bien évidemment fondamental.
Comme deuxième élément de leur démonstration, Hélène et Jean Bastaire convoquent les grandes figures ancestrales du christianisme et démontrent en quoi par leurs dits, leurs écrits ou leurs gestes, ils attestent de la permanence de cette «communion de la nature et des chrétiens». François dAssise en est lexemple le plus connu mais on découvre au fil des pages de nombreuses autres figures comme Isaac de Ninive qui écrit dans ses uvres spirituelles que Dieu «ne peut supporter dentendre ou de voir le moindre mal ou la moindre tristesse au sein de la création».
Dans un troisième temps, les auteurs décrivent comment, à partir du XVIIe siècle, le christianisme «laisse faire» et se rend ainsi «complice» de la réification de la nature. Une fois retirées les âmes des êtres composant cele-ci, plus aucune limite spirituelle et morale nempêche les hommes de la violenter et den abuser pour satisfaire leurs éphémères besoins matérialistes.
La solution préconisée par les auteurs découle naturellement de leur analyse : les chrétiens doivent inclure de nouveau dans leur foi la totalité du monde (la «Création») et rompre définitivement avec un anthropocentrisme destructeur.
De ce vibrant plaidoyer, on regrettera principalement quil se cantonne à la spiritualité chrétienne et à ceux qui en ont été les porte-parole. En 2000 ans, les chrétiens nont pas seulement pensé la nature à laune de leur foi ; ils ont aussi vécu à son contact. Lanalyse des relations quils ont entretenues avec elle, et particulièrement de leurs pratiques et de leurs représentations à son égard, aurait été fort stimulante même si elle aurait certainement nuancé la démonstration des auteurs.
Laissons leur toutefois le mot de la fin auquel toute personne qui se pense comme écologiste agréera sans remords : «Par son action, lhomme doit sans doute remonter la pente de ses déprédations en cessant de se livrer au saccage de la planète. [
] Il ne lui suffira pas de modifier en le pondérant mieux le mode de production et de consommation des sociétés actuelles, tout entier fondé sur la croissance exponentielle dun désir et dun assouvissement chaque fois déçu par sa réalisation même. La révolution devra seffectuer dans lhomme même, au plus profond de son for intime».
Rémi Luglia ( Mis en ligne le 02/04/2004 ) Imprimer | | |
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