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Rayon gay & lesbien -> Littérature |
| David Dumortier Travesti Le Dilettante 2012 / 17 € - 111.35 ffr. / 253 pages ISBN : 978-2-84263-700-2 FORMAT : 12,1cm x 18cm Imprimer
David Dumortier est poète et auteur de littérature jeunesse, et sil avait déjà exploré par dautres biais et façons des questions autour de lidentité sexuelle, notamment dans Medhi met du rouge à lèvres, Travesti aborde de front et crument la réalité dun homme qui se travestit pour dautres hommes. Bien sûr, le livre est écrit à la première personne, bien sûr la vie de cet homme ressemble curieusement à ce que lon sait de son auteur, mais finalement, là nest pas la question, tant le propos justifie à lui seul louvrage, sans quon ait besoin daller chercher des explications ailleurs.
Sophia est donc travestie et il semble venu pour elle le temps de faire des comptes : les hommes quelle a eus, ceux dont elle na pas voulu, son enfance de mal-aimé(e) dans une ferme où son père élevait des cochons, sa vie publique décrivain. Car Sophia est donc un homme qui, dans le secret de son appartement parisien, se travestit pour dautres hommes quelle ne fait pas toujours payer. Il nest donc pas vraiment question ici de prostitution, mais dune sorte de troc clairement présenté : «je les soulage contre une mise à disposition de leur bite». Comme on peut le constater, lérotisme nest pas de mise. Il semble plutôt que Sophia, à travers ses multiples rencontres, cherche à trouver des explications à deux phénomènes : pourquoi un jeune garçon devenu adulte se travestit-il et pourquoi tant dhommes cherchent-ils à fréquenter un travesti ?
Pour répondre à la première question, le narrateur revient, au fil des chapitres, à son enfance au milieu dune famille qui la vite mis de côté : un père rustre et brutal, une mère subissant la vie et distribuant difficilement un peu daffection, et lui, maladroit, peu efficace dans le travail, se cachant pour apercevoir les ouvriers agricoles torses nus. Un raté, en somme. Et plus tard, quand cest devenu possible, le choix du travestissement, un peu comme une vocation, pas comme un pis-aller en tous cas. Tout comme le choix des hommes auxquels Sophia décide de se donner : généralement des arabes, des noirs aussi. La plupart du temps, des hommes sans brillant, sans réussite, plutôt des petits caïds de banlieue qui ne la font pas frissonner, des immigrés clandestins ou bien des ex-taulards, ceux quelle préfère car comme elle, leur regard porte «la rouille des barreaux». Pour eux, pas de honte à être nus, car la déchéance, la honte du travestissement, cest Sophia qui la porte.
Ce nest pas un livre anodin, ni son sujet, ni la tendresse ou les longs cris qui le traversent ne le sont. On en sort un peu abasourdi, pas honteux comme le bourgeois quun mot de travers effraie, mais assez bouleversé pour ce quil fait toucher du doigt : la proximité des corps et leurs entremêlements même, surtout dans la confusion des genres, révèlent beaucoup de ce qui fait lêtre humain.
Amélie Bruneau ( Mis en ligne le 16/04/2012 ) Imprimer | | |
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