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De la destruction
W-G  Sebald   De la destruction comme élément de l’histoire naturelle
Actes Sud - Lettres allemandes 2004 /  2.67 € -  17.50 ffr. / 140 pages
ISBN : 2-7427-4614-5
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A travers trois conférences qu’il prononça à Zurich en 1997, l’écrivain trop tôt disparu W.G. Sebald proposait de relire une des pages les plus sombres de l’histoire de son pays natal : celle des bombardements alliés qui firent tant de victimes parmi la population civile et rasèrent presque totalement plusieurs villes allemandes.

Partant du constat que cette entreprise de destruction massive et acharnée, menée notamment par l’aviation anglaise, n’avait finalement laissé que peu de traces dans la littérature nationale allemande, Sebald se pose la question de ce silence assourdissant. Il évoque quelques auteurs isolés (Heinrich Böll), s’appuie sur des œuvres méconnues du public français (L’Effondrement de Nossak ou Sous les bombes de Ledig) et touche au plus profond la fibre du malaise et de la culpabilité allemands. Qu’on ne s’y trompe pas : l’enjeu n’est pas de remettre en question les responsabilités respectives des belligérants, encore moins de relativiser les torts de l’Allemagne par l’exposé de ses souffrances et de sa ruine finale. Il s’agit plutôt de resituer l’événement dans le cadre général d’une entreprise de destruction, entendue comme «élément de l’histoire naturelle».

Toute la force de la démonstration tient dans sa rigueur et son aspect clinique. Chaque anecdote est donc exposée crûment, et passée au crible de la conscience critique de l’auteur. A cet égard, certains témoignages frisent l’insoutenable… Il monte de ces pages un relent âcre de chair calcinée, il y flotte une poussière en suspens qui obstrue les narines… On bute sur des corps noirs, brutalement déshydratés, rétrécis au tiers de leur volume sous l’effet de la chaleur et du souffle des bombes incendiaires… On croise des femmes au regard affolé, portant dans leur valise, au milieu de quelques dérisoires effets personnels, le cadavre momifié de leur bébé…

De «témoin retardataire», l’écrivain se transforme également en essayiste, notamment quand il adhère à une hypothèse audacieuse – et aberrante par son inhumanité – à propos de la poursuite des bombardements systématiques sur des villes à moindre valeur stratégique : selon Sebald, en effet, l’acharnement destructeur résulterait d’un emballement incontrôlable de l’effort de guerre côté allié, qui nécessitait impérativement l’utilisation de son surplus de production. En clair : pas moins que la nourriture, les bombes ne souffraient de gaspillage… Combien d’innocents citoyens de Dresde, de familles de Hambourg, pâtirent de cette basse politique ?

Chaque œuvre de Sebald, passé maître dans l’art de la digression, est une déambulation à travers une mémoire meurtrie. En filigrane de ce travail minutieux de reconstitution, évoluant par cercles concentriques, s’éloignant de son propos initial pour mieux le cerner, se dessine une critique sans concession de la modernité, qui ne sort pas grandie de ce gâchis barbare. Ainsi Sebald conclut-il par ces phrases de Walter Benjamin, qui éclairent tout son propos : «Les yeux écarquillés, l’ange de l’histoire ne voit qu’une seule et unique catastrophe qui sans cesse amoncelle ruines sur ruines et les précipite à ses pieds. Il voudrait bien s’attarder, réveiller les morts et rassembler ce qui a été démembré. Mais du paradis souffle une tempête qui s’est prise dans ses ailes, si violemment que l’ange ne peut plus le refermer. Cette tempête le pousse irrésistiblement vers l’avenir auquel il tourne le dos, tandis que le monceau de ruines devant lui s’élève jusqu’au ciel. Cette tempête est ce que nous appelons le progrès.»

Des paroles de prophète dont la lucidité semble faite pour mesurer les pires cataclysmes de l’Histoire contemporaine. Même quand elle prétend se parer du Bon Droit ou de la Défense de la Civilisation pour justifier les atrocités commises par les «vainqueurs»...


Frédéric Saenen
( Mis en ligne le 12/03/2004 )
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