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Histoire de la Nouvelle France
Gilles  Havard   Cécile  Vidal   Histoire de l'Amérique française
Flammarion 2003 /  3.82 € -  25 ffr. / 560 pages
ISBN : 2-08-210045-6
FORMAT : 15x24 cm

L'auteur du compte rendu : Hugues Marsat, agrégé d'histoire, est enseignant dans le secondaire. Il mène parallèlement des recherches sur le protestantisme aux XVIe-XVIIe siècles.
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Que reste-t-il du premier empire colonial de la France, dépecé au traité de Paris de 1763 ? Pour les Français, des îles autrefois à sucre et toujours au vent, des noms dans la mémoire nationale ; de l’autre côté de l’Atlantique, les traces n’en sont pas moins réelles pour ceux qui parlent une langue qui est encore celle de Molière et dont l’accent nous prête à sourire sans méchanceté aucune, ou qui portent des noms dont l’origine ne permet aucun doute. Mais avant la guerre de Sept Ans, la majeure partie de l’Amérique du Nord était revendiquée par le Roi de France. C’est cette Amérique méconnue, où la monarchie française espérait construire une nouvelle France, que Gilles Havard et Cécile Vidal, prenant la suite du regretté Philippe Jacquin, nous invitent à découvrir, laissant de côté les Antilles à l’évolution différente.

Qu’on ne s’y trompe pas cependant. Histoire de l’Amérique française n’est pas une énième narration de la geste coloniale, une succession de faits détachés des hommes qui les font, pas plus qu’elle n’est une accusation, un livre noir du colonialisme. Son projet est autre, bien plus ambitieux et scientifique : une réconciliation des «deux tendances majeures de l’histoire coloniale : l’histoire diplomatique, militaire et économique (…) et l’histoire socioculturelle attachée à l’étude des populations allochtones et autochtones du "Nouveau Monde"» (p.11), l’étude d’un vaste projet dont les objectifs ont pu varier au grès des monarques et de leurs ministres, et qui finalement a été sacrifié au profit de la conservation des Antilles, au sucre alors plus rémunérateur.

De fait, sans être oubliée ni négligée, l’histoire diplomatique et militaire borne l’ouvrage. A un bout, les grandes découvertes du XVIe siècle, temps des tâtonnements, (chapitre 1), et les étapes de la colonisation (chapitre 2) fixent les nécessaires jalons de l’extension spatiale, œuvre des Cartier, Champlain, Cadillac et autre Cavelier de la Salle, prenant ainsi la mesure d’un espace dilaté et disparate s’étendant de la froide Acadie, devenue Nouvelle-Ecosse, à l’étouffante Louisiane, en passant par la vallée du Saint-Laurent, les Grands Lacs et le bassin du Mississippi. A l’autre bout, un empire s’effrite plutôt qu’il ne choit (chapitre 12) entre le traité d’Utrecht (1713) qui le prive de l’Acadie, Terre-Neuve et la baie d’Hudson, et le traité de Paris déjà cité, dans lequel disparaissent le Canada français et la Louisiane, cédée à l’allié espagnol pour compenser la perte de la Floride. L’espoir ne fut cependant jamais abandonné de voir renaître la Nouvelle France dans le demi-siècle qui suivit (chapitre 13).

Dans cette immensité viennent se diluer les institutions et le pouvoir royaux (chapitre 3), qui administrent les colonies, divisées en cinq gouvernements, comme des provinces de France, sur lesquelles le gouverneur général et l’intendant de la Nouvelle France, siégeant à Québec, sont censés exercer leurs autorités. Vient surtout se diluer une population multiethnique (chapitre 4) composée d’Indiens durement éprouvés par le choc épidémiologique, d’Européens arrivés en petits contingents et, en Louisiane pour l’essentiel, d’Africains réduits en esclavage. De cette immensité et de sa faible densité de peuplement procède l’originalité du colonialisme français en Amérique du Nord.

Cécile Vidal et Gilles Havard mettent donc un soin particulier dans l’étude des rapports entre les différentes composantes de cette société, de la nécessaire alliance avec les Indiens (chapitre 5), indispensables pourvoyeurs de fourrures et défenseurs contre l’ennemi anglais, qui appellent Onontio (Grande Montagne) le gouverneur du Canada, et le considèrent avec le roi son maître comme un père nourricier et protecteur, symbole ambigu, les deux cultures n’ayant pas la même conception en matière d’autorité parentale (p.178). L’Amérique française est un monde franco-indien (chapitre 6), ce que ne furent pas les colonies anglaises à la même époque.

L’ouvrage donne l’occasion de dépoussiérer et soumettre à la critique historique la fameuse thèse du génie colonial français, diamétralement opposée à l’attitude des colons britanniques face à l’indigène. Par bien des points, ces chapitres sont les plus révélateurs du livre, tant par les éclairages qu’ils procurent sur la vision des Européens par les Indiens que par ceux qu’ils donnent sur la conception d’une société idéale entretenue par la monarchie absolue. La Nouvelle France, laboratoire de l’absolutisme ?

De cette originalité résultent des colonies faiblement urbanisées (chapitre 7), dont les villes sont autant de relais administratifs, pôles de défense et de commerce, interfaces entre l’économie atlantique et les différents espaces des territoires exploités (chapitre 8). A bien des regards, la mise en valeur agricole (rang canadien ou plantation louisianaise), relativement faible, n’apparaît que comme une activité nécessaire pour permettre l’exploitation des ressources halieutiques et cynégétiques, seules à faire l’objet d’un véritable commerce vers la métropole tandis que se tissent des relations commerciales difficilement contrôlées avec les autres colonies (chapitre 9). Il en résulte aussi des sociétés nouvelles, créoles, qui ne sont pas pour autant des modèles (chapitres 10 et 11) mais n’en ont pas moins des identités qui se construisent.

Au terme de cette histoire, aucun aspect n’aura été négligé par ses auteurs qui ont su concilier l’anecdote utile et la scientificité qu’il convenait d’avoir pour un ouvrage aussi ambitieux. Empreinte d’analyses éclairantes que viennent supporter des cartes aussi claires qu’utiles, des notes le plus souvent bibliographiques rejetées en fin de volume, une chronologie nécessaire et surtout une bibliographie impressionnante humblement qualifiée de sélective, cette Histoire de l’Amérique française est une somme qui a su garder une vision d’ensemble de son sujet sans sombrer dans l’érudition. Un ouvrage incontournable.


Hugues Marsat
( Mis en ligne le 01/10/2003 )
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