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Sexe et politique
Thomas  Bouchet     Collectif   Meetings & Alcôves
PU Dijon - Territoires contemporains 2004 /  2.44 € -  16 ffr. / 178 pages
ISBN : 2-905965-95-9
FORMAT : 14x21 cm

L'auteur du compte rendu : agrégé d’histoire, Nicolas Plagne est un ancien élève de l’Ecole Normale Supérieure. Il a fait des études d’histoire et de philosophie. Après avoir été assistant à l’Institut national des langues et civilisations orientales, il enseigne dans un lycée de la région rouennaise et finit de rédiger une thèse consacrée à l’histoire des polémiques autour des origines de l’Etat russe.
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La sexualité n’a pas été un sujet de consensus dans la gauche européenne et étatsunienne : les actes du colloque de Dijon réunis sous ce titre ne nous l’apprennent pas, mais le confirment et le montrent sur de nouveaux cas concrets. Il serait d’ailleurs excessif de dire que les débats ont cessé, comme quelques voix homophobes de gauche ou la lâcheté d’une bonne partie des députés français au moment du vote du Pacs l’ont montré, mais les années 1990-2000 ont vu un certain consensus se faire autour à la fois d’une conception libérale des droits de l’individu dans sa vie privée et d’une reconnaissance «laïque» par l’Etat démocratique du droit des individus de s’épanouir librement (entre adultes) selon leurs sensibilités amoureuses dans un cadre social tolérant voire aussi accueillant que possible.

Cet état de fait, avec ses ambiguïtés et ses limites, est de toute évidence une conséquence de la libération sexuelle et de sa thématisation politique dans les démocraties libérales depuis 1960-70 et d’abord dans la gauche américaine («liberal» - rappelons que les démocrates comptent dans la Bible Belt un fort bataillon de protestants conservateurs sur les sujets de société, souvent plus à droite que les républicains des grandes villes du nord). Mais en fait la gauche, depuis sa naissance avec les révolutions démocratiques de la fin du XVIIIe siècle, n’a pas été homogène sur la morale sexuelle et la position que l’Etat devait adopter à ce sujet : les lignes de partage traversent les continents et les pays, comme les évolutions se firent à des rythmes différents.

Les auteurs rappellent que «la gauche» est plurielle comme «les sexualités» et qu’elle regroupe des organisations, des institutions et des courants de pensée divers, hétérogènes, qui divergèrent sensiblement sur bien des sujets et d’abord sur la définition même de la gauche. Les auteurs s’en tiennent justement à la revendication d’appartenance à la gauche pour sélectionner leurs sujets d’étude et éviter un tri arbitraire et idéologiquement orienté. En gros, ils retiennent les courants qui, du libéralisme américain au radicalisme démocratique en passant par le marxisme (socialiste puis communiste), ont incarné un parti du mouvement, opposé à un simple Etat-gendarme libéral ou autoritaire, campé sur des missions régaliennes et indifférents aux inégalités sociales. Le choix de 1850 implique cependant celui d’un critère de critique sociale égalitaire, qui laisse du côté de la droite ou du centre les libéraux whigs qui formaient une partie essentielle de la gauche politique des révolutions, mais basculèrent, avec logique, une fois l’Etat libéral fondé, dans le camp de la conservation des «libertés» bourgeoises. Même ainsi, les gauches diffèrent non seulement sur l’économique, le social et le sociétal.

Pour schématiser, la gauche née de la critique morale de l’individualisme bourgeois et de l’exploitation du travail ouvrier de l’âge industriel, reste, même dans sa version marxiste ou révolutionnaire ouvriériste, tributaire à la fois d’une morale commune populaire et d’un fond de christianisme laïcisé, qui lui rend scabreuses et indignes d’attention sérieuse la plupart des questions sexuelles, quand elles ne sont pas écartées comme diversions par rapport au travail militant et à la cause. Le socialisme fait souvent preuve d’une compassion moralisatrice sur la prostitution, avant de fustiger l’immoralité sexuelle comme un attribut logique des riches, pervers hypocrites. On comprend aussi que l’utopie de la communauté idéale harmonieuse, ce mythe au sens sorélien, pouvait être menacée par des remises en cause sophistiquées des modèles populaires de la famille et de l’ordre finalement patriarcal : en témoigne la bataille difficile des femmes, même militantes, pour l’égalité et le respect dans les organisations ouvrières. Adultère, libertinage, homosexualité scandalisent plus qu’ils ne suscitent la réflexion distanciée. Socialisme et communisme jouent souvent sur ce terreau disponible d’une sorte de morale naturelle dont ils se font les expressions politiques : partis du peuple, ils deviennent des partis d’hommes poussés à prendre leurs sentiments pour la mesure de la justice et de la nature. Le cas de Roger Vaillant, communiste libertin, est l’exception qui confirme la règle (les secrétaires-maîtresses du Chef du Parti). Le Labour («No sex please, we’re socialists»), quant à lui, incarne l’hypocrisie et la lâcheté d’un parti timoré sur les grandes questions de la sexualité, tabou majeur de la socialisation victorienne (et donc aussi son obsession, populaire et «scientifique», comme l’a rappelé Foucault). Quant à l’étude sur la revue laïque L’Ecole émancipée, elle montre que la volonté des instituteurs syndiqués, socialisants, et leur action militante pour l’éducation sexuelle au tournant des XIXe et XXe siècles vise à former des couples et des familles stables et à limiter les familles nombreuses dans un esprit de néo-malthusianisme et de pacifisme.

C’est dans le milieu anarchiste avec sa morale libertaire, radical et libéral, plus soucieux des droits de l’individu, fin de l’action, que logiquement la problématique d’une sexualité moins tabou et plus libérée dans une société tolérante émerge («Le socialisme guérira de tout sauf d’un mauvais mariage»). Les libéraux anglais comme américains sont plus portés à défendre avec cohérence, par relativisme ontologique et individualisme moral, l’idée d’une responsabilité totalement privée des comportements amoureux entre adultes consentants et à demander à l’Etat de se limiter à protéger les droits de chacun.

La communication sur «Sexpol, organe reichien» revient sur la trajectoire du psychanalyste austro-américain W.Reich, qui, quittant Freud pour le freud-marxisme et l’analyse du fascisme comme sadisme et éroticisation des masses par le Chef, finit en théoricien sulfureux de l’orgone (vésicule d’énergie vitale et sexuelle dans l’atmosphère, responsable de la libido), condamné pour charlatanisme et exercice illégal de la médecine. La défense par la revue Sexpol, pendant cinq ans, de la liberté du corps et de l’importance de la sexualité épanouie, crée un forum d’expression sans tabou et de thérapie collective avant d’alimenter un courant consumériste peu soucieux des luttes sociales, qui pose la question des limites de la gauche…


Nicolas Plagne
( Mis en ligne le 27/09/2004 )
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