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Histoire & sciences sociales  ->  Témoignages Historiques  
 

Sur les traces d’Homère
Gérard  Fry   Récits inédits sur la Guerre de Troie
Les Belles Lettres - La roue à livres 2004 /  3.82 € -  25 ffr. / 412 pages
ISBN : 2-251-33932-9
FORMAT : 14x21 cm

L'auteur du compte rendu : Sébastien Dalmon, diplômé de l’I.E.P. de Toulouse, est titulaire d’une maîtrise en histoire ancienne (mémoire sur Les représentations du féminin dans les poèmes d’Hésiode) et d’un DEA de Sciences des Religions à l’Ecole Pratique des Hautes Etudes (mémoire sur Les Nymphes dans la Périégèse de la Grèce de Pausanias). Ancien élève de l’Institut Régional d’Administration de Bastia, il est actuellement professeur d’histoire-géographie.
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Depuis un film hollywoodien récent, la guerre de Troie est à la mode, et le vulgaire prête dorénavant les traits de Brad Pitt à Achille ou ceux d’Hélène Kruger à la belle Hélène. Il n’est jusqu’à la revue L’Histoire qui ne sorte ce mois-ci un numéro spécial de ses Collections consacré à la Méditerranée d’Homère.

Les Belles Lettres, qui ont déjà eu la bonne idée d’éditer en format de poche une édition bilingue de l’Iliade et de l’Odyssée (en trois volumes pour chacune des épopées), en profitent pour effectuer un second tirage (le premier datait de 1998) d’œuvres un peu moins connues que celles de l’«éducateur de la Grèce». Nul texte grec ou latin en regard ici, même si l’on peut le regretter (mais c’est le cas des autres titres de la collection «La Roue à Livres»). Le texte proposé de l’Ephéméride de la guerre de Troie et de l’Histoire de la destruction de Troie a été réalisé d’après les traductions latines d’œuvres grecques perdues ou du moins très incomplètes. Les nostalgiques de la pureté originaire déploreront sans doute l’abâtardissement d’originaux forcément déformés par l’intervention de traducteurs successifs, d’autant plus que Gérard Fry a pris le parti de conserver les noms propres latins. L’Iliade latine est une sorte de résumé d’Homère par un présumé Baebius Italicus (1070 vers en face des 15693 de l’original), mais qui affirme cependant une certaine originalité.

Commençons par cette dernière, qui ouvre le recueil. L’auteur serait un certain Publius Baebius Italicus, haut fonctionnaire clarissime, c’est-à-dire sénateur. Le poème semble avoir été écrit entre 60 et 68. Il ne s’agit pas, malgré les apparences, d’un simple résumé (même si cette opinion a assuré la survie de ce court texte), bien que l’auteur serre de très près le tissu narratif de son modèle, notamment par la structure en 24 chants. Mais ceux-ci sont de longueurs très inégales (149 vers pour le chant V, 4 vers seulement pour le chant XIX), et il semble bien que ce découpage n’ait pas fait partie du dessein original de l’auteur, puisqu’il y a parfois changement de chant en milieu de vers. La romanité de l’auteur apparaît à travers l’irruption d’anachronismes (présence d’un combattant à cheval, siège du camp achéen par les Troyens qui forment la tortue comme le feraient les légionnaires…), par une sympathie discrète mais significative pour les Troyens, et par l’adhésion à une morale toute romaine, parfois insensible aux exigences du code d’honneur homérique. De plus, la langue et le style rappellent Ovide et, à un moindre degré, Virgile.

L’Ephéméride de la guerre de Troie a été rédigée en grec entre 66 et 206 ap. J.-C. (probablement aux alentours de la fin du IIe siècle) et traduite en latin probablement dans le premier quart du IVe siècle de notre ère. La rédaction de l’original grec est attribuée à un contemporain du conflit, Dictys de Crète, qui participa à la campagne aux côtés d’Idoménée (et donc des Achéens). L’Ephéméride contient le récit complet de la guerre de Troie, depuis les événements qui sont à l’origine du rapt d’Hélène jusqu’aux retours des héros, et leur ultime prolongement : la mort d’Ulysse. Elle a donc la même ampleur que le Cycle troyen, qui comprenait trois parties. La première (prehomerica) était constituée d’un seul grand poème anonyme, longtemps attribué à Homère, les Chants cypriens ou Cypria, commençant par l’exposé des origines du conflit (le mariage de Thétis et Pélée, la pomme de Discorde et le jugement de Pâris) et finissant avec l’attribution de Briséis à Achille. La deuxième (homerica) était constituée de la seule Iliade, contenant le récit des événements qui vont du retrait d’Achille à la mort d’Hector. La troisième (posthomerica) était la plus complexe, constituée de six poèmes : l’Ethiopide d’Arctinos de Milet allant des exploits de Penthésilée et de Memnon jusqu’à la mort d’Achille ; la Petite Iliade de Leschès de Mytilène allant de la dispute surgie à propos de l’attribution des armes du défunt Achille jusqu’à la construction du cheval de bois ; l’Ilioupersis d’Arctinos de Milet racontant la prise d’Ilion ; les Nostoi d’Agias de Trézène faisant le récit du retour des héros Achéens dans leur patrie ; l’Odyssée d’Homère contenant le récit du retour d’un héros particulier, Ulysse ; et enfin la Télégonie d’Eugammon de Cyrène prenant sa suite et s’achevant sur le meurtre d’Ulysse par Télégonus, le fils qu’il avait eu de Circé.

Hors les poèmes homériques, presque rien ne subsiste de toutes ces œuvres ayant pris forme définitive entre 800 et 500 av. J.-C., sinon de rares et maigres fragments, ou les résumés que l’on en trouve dans d’autres œuvres plus tardives. Des versions plus historiques et rationalistes des événements voient aussi le jour, dont l’Ephéméride participe, notamment par sa volonté de se rattacher au témoignage direct d’un acteur de la guerre de Troie. Ce qui lui permet d’évincer les auteurs des Cycles (et au premier chef Homère) comme non véridiques, en rapportant des versions différentes d’une même histoire, et en débarrassant l’intrigue des dieux et du merveilleux (Thétis est ainsi totalement humaine, et ses noces ne sont pas à l’origine de la guerre de Troie ; Priam n’est pas guidé par Hermès lorsqu’il va chercher le corps de son fils Hector…). Cet évhémérisme se retrouve d’ailleurs dans le récent film de Wolfgang Petersen. Les aspects idéologiques de l’œuvre sont également intéressants. Si les Grecs s’emparent de Troie, ce n’est pas tant grâce à la ruse du cheval que parce qu’Enée et Anténor ont trahi. L’Ephéméride n’est donc pas seulement une tentative de faire mentir Homère, mais aussi une protestation contre un pouvoir romain né d’une trahison de son lointain fondateur.

L’Histoire de la destruction de Troie, dont on n’a conservé que la version latine (datant du Ve ou du VIe s. ap. J.-C.), prétend également à l’authenticité historique, et se présente comme l’œuvre de Darès le Phrygien, qui aurait combattu dans le camp troyen. L’original grec (s’il a existé !) a dû voir le jour au cours du Ier ou au début du IIe s. de notre ère. L’œuvre est beaucoup plus brève que l’Ephéméride ; il faut dire que sa densité événementielle est moindre. L’archéologie du conflit est retracée depuis le mauvais accueil fait aux Argonautes par Laomédon, père de Priam, qui déclenche l’expédition punitive d’Hercule et l’enlèvement d’Hésione, fille du roi. Hélène n’est enlevée qu’en représailles de ce premier rapt. Comme Dictys, Darès évacue tout surnaturel et livre une version rationaliste des événements (ainsi, le jugement de Pâris n’est plus que l’objet d’un rêve de la part du prince troyen alors qu’il chassait sur l’Ida). Sont ensuite décrits les préparatifs de l’expédition, les premiers combats indécis, la mort d’Hector, celle d’Achille, l’arrivée des alliés de Troie (Penthésilée et Memnon) et leurs défaites. Le récit s’achève sur la trahison d’Enée et d’Anténor qui provoque la prise de la ville (le cheval est réduit à un simple motif décoratif peint sur la porte qu’Anténor ouvre aux Grecs).

Même si Gérard Fry se laisse parfois aller à des jugements quelque peu dépassés (il voit ainsi l’Antiquité tardive comme une période «inculte et pressée» - p.17), les introductions, les notes, la bibliographie et les utiles index de noms propres témoignent du sérieux de l’entreprise. La mise à disposition de ces œuvres méconnues d’un public francophone est à saluer, d’autant plus que c’est à travers elles que le monde médiéval, byzantin et occidental (qu’on pense au Roman de Troie), a appris l’histoire du cycle troyen. Les romans historiques, bandes-dessinées (Eric Shanower, Un millier de navires, Akileos, 2004) et autres péplums (dont celui de Wolfgang Petersen) semblent y avoir puisé autant que dans l’Iliade.


Sébatien Dalmon
( Mis en ligne le 27/07/2004 )
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