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Cet obscur objet du délit
Julien  Cendres   A la splendeur abandonné
Joëlle Losfeld 2002 /  2.6 € -  17 ffr. / 85 pages
ISBN : 2844121268
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Rappel des faits : Julien Cendres, un matin de mars 1988, voit la porte de son appartement enfoncée par deux policiers qui se jettent sur lui et, après avoir procédé à une fouille en règle, l'emmènent menotté au commissariat. Son crime ? Avoir envoyé à la revue belge L'Espoir quelque mois plus tôt un court poème érotique, A la splendeur abandonné. Le directeur de la revue ayant fait l'objet d'une procédure judiciaire pour "excitation de mineurs à la débauche", ses archives ont été saisies. Pas de chance : le poème, non publié, s'y trouvait. Quelques officiers de police zélés ont fait le reste, aiguillonnés par un ministre de l'Intérieur désireux de montrer aux Français en pleine élection présidentielle qu'il entend bien lutter contre la décadence morale qui ronge notre beau pays. Une pétition de vingt-sept intellectuels dénonçant "l'amalgame fait entre la prise de contact avec des supports de presse ou d'édition et les éventuels infractions ou délits pour lesquels ces supports peuvent être incriminés" mettra un terme à ce scénario qui peut au choix faire rire ou frissonner de colère (rire, au moins, au dialogue entre le poète appréhendé et un inspecteur : "Mais enfin, c'est un texte de fiction ! - Vous foutez pas de ma gueule ! Ca ne se passe pas dans les étoiles !").

A une époque où le discours sécuritaire monopolise la parole publique, nul doute que Joëlle Losfeld, en éditant ce poème assorti de nombreux documents, fasse oeuvre utile. On ne niera pas non plus qu'elle brosse dans le sens du poil un public qui aime à se faire peur en se fantasmant sous Vichy ou quelque dictature orwellienne (dans le même registre, on se rappelle le battage médiatique qui avait entouré la réédition fin 99 du Jeanne la Pudeur de Nicolas Genka dont le bandeau proclamait fièrement : "Censuré depuis 35 ans !"). Enfin, on s'interrogera sur la pertinence de cette démarche éditoriale : publier le poème, certes, mais s'acharner à l'estampiller "censuré" ? Le dossier qui l'accompagne laisse perplexe : au mieux lénifiant (ah ! Dominique Noguez et Régine Deforges invoquant d'une même voix vibrante Lautréamont, Baudelaire, Rimbaud, Verlaine, Sade, Bataille...) au pire ridicule (les messages de soutien adressés à l'auteur par les pétitionnaires évoquent quelque maladroite lettre de recommandation). Le sommet est atteint dans la conversation téléphonique avec Duras, pompeusement intitulée "La Censure", dont on retient surtout l'état d'égarement de M.D. et cet aveu hilarant : "La censure, je suis pour. Il faut censurer les livres, les journaux, la télévision. Tout, enfin." Avant de déplorer, dans un éclair de lucidité : "Aujourd'hui, je peux dire n'importe quoi, n'importe où, indifféremment, tout passe. Ce n'est plus la peine..."

Du visage muselé en couverture à ce dossier d'instruction qui ferait rougir n'importe quel écrivain, tout est fait, finalement, pour conditionner l'esprit critique du lecteur en le détournant de "l'objet du délit" : quatre pages d'une resucée de Genet au ton péremptoirement adolescent. En chemin, l'éditeur semble oublier que la meilleure façon de défendre un écrivain est avant tout de faire entendre sa voix. Et préfère mentionner en annexe la liste des tables rondes auxquelles notre poète maudit a participé (de 1988 à 1991) plutôt que publier un autre de ses textes...

Julien Cendres avait-il vraiment besoin qu'à l'humiliation policière s'ajoute l'affront éditorial ? On peut se poser la question. On sait en revanche quelle fière chandelle il doit à la police française pour avoir contribué de façon aussi efficace à cette parution.


Pierre Brévignon
( Mis en ligne le 17/06/2002 )
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