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Les animaux qui expliquent l’homme
Armelle  Le Bras-Chopard   Le Zoo des philosophes - De la bestialisation à l’exclusion
Plon 2000 /  3.94 € -  25.8 ffr. / 390 pages
ISBN :  2259188249
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L’identité de l’homme est fuyante. Les philosophes nous ont appris à la contempler dans de multiples miroirs, des vitrines de la société de consommation aux prunelles de notre alter ego Mais plus fondamentalement, avant que les rempart de la communauté ne se transforment en village mondial et notre voisin en serial killer totalitaire, c’est par référence à l’animal que l’humanité s’est constamment située au long des siècles. Car la bête séjourne aussi bien dans le zoo de centre ville que dans l’inconscient inhérent à chacun.

Armelle Le Bras-Chopard, prix Médicis 2000 de l’essai, reprend ici certaines des métaphores les plus signifiantes de cette relation afin d’en proposer une lecture politique: les références invariantes aux caractéristiques animales qui sont légion dans les textes des philosophes, politologues et scientifiques convoqués dans ces pages expliquent selon l’auteur comment a pris forme de tous temps la "domination" de l’homme sur ses semblables.

Puis, de quelle manière à partir de cette supériorité prétendant puiser au racines de la naturalité zoologique s’est organisée une "exclusion" méthodique. Celle des trois catégories jugées relégables par l’être civilisé. Lieu de prédilection pour les "femmes", les "barbares" et les "peuples" spécifiques qui vont y être cantonnés, le "zoo" reçoit en clair ses lettres de bassesse d’une volonté de mise à l’écart, bientôt de destruction quand ce ne n’est pas d’extermination radicale, attestée par l’Histoire.

Le Zoo des philosophes consacre donc logiquement de longs passages à la mise en exergue de ce "lieu réel ou symbolique où des individus ont été introduits contre leur gré, au nom d’une définition arbitraire". Un enfermement et une rupture d’avec la communauté organisée qui présuppose explicitement une "sélection" puis toute "une série d’exclusions" culminant dans les "gynécides" et "génocides" condamnés par l’essayiste. A travers quelques chapitres judicieux, il est bien montré le rôle dans une telle démarche de la "dénomination", du "travail", du "corps social". Mais aussi à rebours le danger afférent aux "bactéries", aux "sorcières" et aux "métamorphoses" sacralisant le passage d’un règne dans un autre…

On souhaiterait que le passage d’une carence physique à l’attribution ou au retrait de tel ou tel caractère moral soit développé davantage, que les "procès d’animaux" faisant fureur dès le Moyen Age bénéficient d’un traitement plus détaillé ici. Même si l’auteur se défend de présenter un bestiaire, c’est-à-dire un "catalogue" descriptif des animaux rencontrés dans les oeuvres littéraires ou philosophiques, force est de reconnaître qu’à la longue le feu croisés des innombrables références et citations provoque sur le lecteur un effet indigeste. Etant entendu qu’il est inévitable en même temps de générer à partir des vingt-cinq siècles d’histoire passés ainsi en revue, des Grecs jusqu’au clonage, des frustrations et des déceptions. Nonobstant, Armelle Le Bras-Chopard parvient à mettre l’accent sur cette "fonction du référent animal" à l’oeuvre dans les processus de domination et exclusion qu’elle a pointé dès l’introduction de son essai.

Plutôt que de lui chercher noise, comme s’y est attardé un critique du journal Le Monde ayant sorti les griffes devant ce sulfureux traité maculant la sacro-sainte réputation de ces monstres d’intelligence que sont les philosophes, plus opportun nous paraît en la matière le chevauchement d’une banalité par une autre: celle du "mal" mémorablement dénoncée par Hannah Ardent par celle de l’"animal", censément moins nocif. Que celui-ci puisse amener à celle-là n’est pas fait si évident que l’argument ne mérite d’être débattu et commenté.

Selon la formule, "on achève bien les chevaux": pourquoi ne martèlerait-on pas à l’envi le danger, éthique et politique, d’une comparaison orientée entre homme et animal? Que ce soit une femme qui s’y attelle, si l’on ose dire, constitue sans doute la goutte faisant déborder le vase machiste avec lequel certains, semblables en cela aux physiognomonistes, ont le tort de comparer la taille de leur cerveau. C’est un fait que pour le lettré ou l’érudit de service, seule la troisième partie de l’ouvrage développe les thèses de départ en offrant l’amorce d’une position plus engagée sur le sujet. Encore les renvois précédant doivent-ils être estimés comme une invitation pour l’honnête homme à poursuivre le débat avec les auteurs qui lui sont présentés, occasion d’affronter à l’abri de pages sécuritaires ces animaux, anodins et extraordinaires, peuplant l’imaginaire occidental.

A l’instar du héros de Lovecraft servant de fil directeur à l’essai, à qui un séjour à Innsmouth révèle sa bestialité toujours déjà-là, Armelle Le Bras-Chopard arpente vaillamment, entre marécages élitistes et déjections de soue, l’étroite sente qui mène de l’anthropomorphisme et du zoomorphisme à la difficile définition de soi. Elle foule sans complexe (freudien) le "cercle maudit" par lequel Levi-Strauss désignait la division mortifère entre animalité et humanité. Le zoo dont elle nous offre la visite avertie n’est pas une école de vie: c’est une antichambre de la mort où chacun découvre ce qu’il doit de son intégrité aux bêtes.

Une ménagerie dont on aimerait que figure sur sa façade à titre d’avertissement, tel certain motif grec ornant le temple de Delphes, cette formule de l’auteur: "La bête est toujours dans ce que ne peut faire le mâle humain."


Frédéric Grolleau
( Mis en ligne le 08/03/2001 )
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