L'actualité du livre
Littératureet Romans & Nouvelles  

Mon hiver à Zéroland
de Paola Predicatori
Les Escales 2013 /  21,90 €- 143.45  ffr. / 305 pages
ISBN : 978-2-36569-030-0
FORMAT : 14,5 cm × 22,5 cm

Anaïs Bokobza (Traducteur)

Zêta et Zéro

Libraire à Milan, Paola Predicatori nous propose son premier roman : Mon hiver à Zéroland. Alessandra, la narratrice, a 17 ans quand sa mère, qui a souffert pendant deux ans, meurt d’un cancer du rein. Elle est en terminale et passera le bac à la fin de l’année. Elle reste seule avec sa grand-mère anéantie par le drame.

Nous sommes en hiver et quand Ale revient en classe après l’enterrement, pour être tranquille, elle s’assied au fond de la classe, auprès du solitaire Gabriele, dit Zéro pour son comportement asocial et son intérêt inexistant pour les études, sauf pour le dessin qui est sa passion. Ainsi, les autres camarades ne l’importuneront pas avec leurs questions idiotes, pense-t-elle. Mais Zéro se révèle différent du garçon marginal et véritable paria que les autres connaissent.

Le livre est partagé entre la douleur d’Alessandra - «Après la mort de ma mère j’en voulais au monde entier» - et sa découverte d’un Gabriele sensible, discret et attachant. Elle découvre une nouvelle image de soi et seul Zéro semble comprendre sa souffrance, lui-même immergé dans sa solitude et ses problèmes familiaux. Il a dû grandir trop vite, il est plus mûr que les autres et l'anime un profond désir de liberté.

Rien n’est simple ; ces deux cœurs en hiver se trouve dans un univers spécial qu’Alessandra nomme Zéroland : «C’est peut-être cela quand je suis avec Gabriele : une autre planète. Loin de tout ce que je connais, dans un monde à part, dans une coquille, comme quand je m’allongeais à côté de ma mère et que j’essayais de trouver un autre temps dans le temps. A présent c’est un espace juste pour nous deux, sans rien, sans personne. Nous sommes à Zéroland».

Alessandra pense constamment à sa mère, elle ne parvient pas à faire son travail de deuil ; elle se débat avec ce souvenir trop présent pour apaiser sa douleur. La jeune fille est tantôt lucide quant à son chagrin et tantôt confuse dans ses décisions pour elle-même et pour Gabriele. Elle n’ose pas s'avouer qu’elle l’aime et parfois le rejette sans raison. Sa logique est perturbée, sa voix est abrupte dans le compte rendu du présent et très douce dans l’évocation du bonheur passé.

Dans ce premier roman, la mer est signe de vie, d’espace d’évasion, et dès qu’ils le peuvent les deux jeunes fuient en scooter vers la plage en hiver, sur l’étendue de sable, sauvage et déserte en cette saison. Un livre attendrissant d’une subtile tristesse avec un fond d’espoir pour Zêta (la lettre Z en italien ; c’est ainsi qu’elle se surnomme) et Zéro. Un récit tout en émotions - souffrance, peur, douleur, amour -, à la fois léger pour son évocation de l'adolescence, et profond quand il décrit la façon dont Alessandra et sa grand-mère affrontent la vie après la perte d’un être adoré. La preuve que la somme de deux zéros est parfois beaucoup plus que zéro.

Eliane Mazerm
( Mis en ligne le 13/12/2013 )
Droits de reproduction et de diffusion réservés © Parutions 2024
www.parutions.com

(fermer cette fenêtre)