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Littératureet Poches  

Le Contrat
de Boileau- Narcejac
Gallimard - Folio policier 2015 /  6.50 €- 42.58  ffr. / 208 pages
ISBN : 978-2-07-046506-4
FORMAT : 10,7 cm × 18,0 cm

Pour l’amour d’un chien

La collaboration de Pierre Boileau et Thomas Narcejac est très fructueuse dans les années 50 ; citons par exemple Celle qui n’était plus (1952) devenu au cinéma Les Diaboliques d’Henri-Georges Clouzot. La même année est publié D’entre les morts, roman dont Hitchcock tirera Sueurs froides. Ils sont alors les maîtres du roman à suspense. Le Contrat est publié plus tard, en 1988, un an avant la mort de Pierre Boileau.

Nous sommes en août ; G. est un as de la gâchette au talent mal payé, un homme mal reconnu et mal récompensé. Avant d’être tueur à gages et d’exécuter des contrats pour un commanditaire mystérieux, Monsieur Louis, il se produisait dans des cirques, des music-halls et autres spectacles. Il ne s’est jamais posé la question du bien-fondé de ces exécutions sur commande ; pourtant, cette vie bien rangée, agencée et paisible en apparence n’est jamais à l’abri d’un quelconque dérèglement. Ce grain de sable va se matérialiser sous la forme d’un attentat dont il est témoin. Il est alors déstabilisé, choqué par cette grande violence : «Le terrorisme c’est vraiment la forme la plus grossière et pour un peu il penserait - la plus mal élevée – du meurtre. Il sent confusément qu’il y a une différence de nature entre la purée d’entrailles d’un massacre et l’orifice à peine sanguinolent d’un projectile» (p.19).

Sollicité pour un contrat en province, dans la ville thermale de Chatelguyon, G. a la main droite légèrement défaillante et si sa mission est accomplie, il n’est pourtant pas fier car il a blessé Romulus, un chien-loup. Cet homme qui n’a aucun scrupule à supprimer un être humain va recueillir cette bête à laquelle il s’attache. C’est le début d’une traque par Monsieur Louis qui sait qu’une enquête de routine peut démolir toute une organisation ; c'est aussi le début d’une belle amitié avec l’animal que le tueur va soigner et choyer.

Boileau-Narcejac nous livrent une fois de plus un admirable roman policier, mais également une véritable histoire d’amour entre un homme et son chien : «G. est fier de sa bête. Il explique que c’est un berger allemand encore très jeune et un peu fou mais d’une merveilleuse intelligence»(p.122). Cet homme qui n’a jamais connu l’amour ou passagèrement se découvre un potentiel de tendresse, un besoin de prodiguer sa protection envers un animal blessé par sa faute. Ce sont les angoisses, la tendresse, la souffrance, les joies qui le relient à son protégé, face à des adversaires qui n’ont qu’une solution : les éliminer.

On a pourtant ici un vrai roman noir, un roman poignant sur la communion entre deux êtres solitaires, communion de pensées et de sentiments.

Eliane Mazerm
( Mis en ligne le 04/01/2016 )
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