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Littératureet Récits  

Tu vivras toujours
de Arnaud Genon
Editions de la Rémanence 2016 /  10 €- 65.5  ffr. / 78 pages
ISBN :  979-10-93552-40-8

Arnaud Genon collabore à Parutions.com

Adiós a mamá

Le récit s'ouvre le soir, dans une chambre d'enfant. On pense au petit Marcel P., ''longtemps (...) couché de bonne heure'', d'autant qu'il est question ici aussi de remembrance. Spécialiste de l'autofiction, Arnaud Genon, pour la première fois ici, se prête à l'exercice et replonge dans les souvenirs douloureux liés à la perte de sa mère, décédée d'un cancer alors qu'il n'avait que 13 ans. Images douces amères de l'amour maternel, de la perte, de l'entrée dans l'adolescence, d'une époque révolue aussi, les années 80, sans internet, bidules portables ni consoles de jeu...

78 pages, un récit court, qui va à l'essentiel, rapiéçant par les mots les moments, les impressions, sentiments, comblant les vides ou abdiquant devant l'oubli. L'autofiction peut dériver vers l'hermétisme de l'ego, un quant à soi laissant le lecteur comme inerte. Il n'en est rien ici. En mettant a nu, par l'artifice littéraire, cette part de soi, ce moment à lui, Arnaud Genon nous parle aussi de nous, par le jeu d'affinités générationnelles peut-être - une enfance dans les années 80 -, socio-géographiques aussi - la France des classes moyennes, la Province, le Sud-Ouest (nous sommes à Pau) -, ou simplement humaines : l'amour, les liens familiaux, la mort, la maladie. "Oncologie, marqueurs tumoraux, rayons, cellules et autres lymphocytes constituaient le champ lexical d'une poésie douloureuse".

Mission accomplie donc. L'auteur se met en scène en compositeur autofictif quand, enfant de 11 ans, il doit raconter dans un devoir d'école un souvenir heureux : "Je pris beaucoup de plaisir à l'écriture de ce mensonge. Ce n'était pas une fiction, juste un arrangement avec la réalité. J'avais distendu le temps et l'atmosphère, ajouté quelques éclats de rire, intercalé des souvenirs beaucoup plus anciens, changé le menu... Chaque élément du récit, pris séparément, était vrai, finalement. Ils avaient existé. Mais dans des lieux et à des dates différentes. J'avais simplement reconfiguré l'ensemble".

A 39 ans, l'enfant devenu adulte, professeur, écrivain, peut mieux saisir l'instant dans son ensemble, se mettre aussi dans les regards de papa, de maman, maintenant qu'il est père à son tour et du même âge qu'eux à l'époque. Une écriture d'autant plus juste qu'Arnaud Genon en connaît mieux que d'autres les ressors, les impasses. Un récit tout à fait juste en somme, parfait équilibre entre le ''moi'' et le ''nous'', émouvant sans pathos, littéraire sans effets marqués. Simplement juste.

Thomas Roman
( Mis en ligne le 27/06/2016 )
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