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La Puissance de la joie
de Frédéric Lenoir
Le Livre de Poche 2017 /  6,90 €- 45.2  ffr. / 256 pages
ISBN : 978-2-253-18608-3
FORMAT : 11,0 cm × 17,8 cm

Première publication en octobre 2015 (Fayard)

La joie à portée de main

Après son «voyage philosophique» en quête du bonheur, mené en 2013, Frédéric Lenoir, dans ce nouvel essai, aborde un état considéré habituellement comme moins durable, plus imprévisible, mais aussi plus intense : la joie.

Très vite, une problématique naît, qui va lui servir de fil directeur : la joie, cette sensation si forte et si fugace, qui touche le corps dans son ensemble et convoque soudainement l'esprit, le coeur, l'imagination, n'est-elle pas pour autant «domptable» ? Est-il possible d'élaborer un cheminement qui permettrait de la (re)trouver pendant un temps illimité, sans en perdre pour autant la vivacité ?

Pour répondre positivement à ces questions, Lenoir élabore une réflexion qui, à première vue, semble très méthodique, scolaire, à l'image de l'itinéraire précis qu'il désire faire suivre à son lecteur. Il divise son livre en sept grands chapitres qui retracent le parcours de sa pensée, d'un travail de définition préliminaire (lui permettant d'écarter les notions similaires de «plaisir» et de «bonheur») à la possibilité d'une «sagesse» de la joie. L'itinéraire passe par une énumération des postures et attitudes à adopter pour aboutir à une joie «douce et profonde», puis par deux chemins principaux pour nous y conduire : la «joie de la libération» (aller vers soi), et la «joie de la communion» (aller vers le monde).

Lenoir parvient à l'évidence d'une «joie de vivre» caractéristique de l'être humain, en mêlant références universitaires et preuves subjectives tirées de sa propre vie. Il évoque ainsi des quêtes philosophiques qui ont convoqué la notion de «joie» (de Spinoza, Nietzsche ou Bergson), mais dévoile aussi ses expériences, en multipliant les anecdotes le concernant. Ce va-et-vient entre savoir universitaire et expérience personnelle rend l'essai vivant et facile d'accès : Lenoir insiste dès les premières pages sur l'oralité et la spontanéité de son écriture, proche de la forme des enseignements qu'il a délivrés.

On pourrait lui reprocher cependant cette posture de professorat. En mêlant arguments d'autorité empruntés à sa culture philosophique et chrétienne, et accumulation de sentences (utilisation du présent de vérité générale, multiplication de l'usage du pronom «on»), son écriture semble parfois tendre à la généralisation facile, et, même, à un psychologisme un peu réducteur. La réflexion devient «guide» pour accéder à la «joie», «recette» subjective transformée en dogme, glissant parfois vers une leçon morale ou politique : lorsqu'il passe par exemple de l'importance de l'amour porté aux animaux à la critique de la corrida puis immédiatement après de l'élevage intensif. Certes... mais cet enchaînement rend le propos plus superficiel, et empêche tout débat possible. On peut alors se sentir étouffé par cette omniprésence du «je».

Cependant, et heureusement, le lecteur se reconnaît aussi dans ce qui est écrit, et ce qui pourrait paraître comme un «guide» instructif peut aussi se muter en une confession qui devient le partage d'intuitions communes, réjouissantes, car justement la «joie», universelle, devient évidente. Oui, Lenoir ne choisit pas la complexité. Oui, la philosophie devient vulgarisation presque affichée. Oui, l'écriture parce qu'orale est peu travaillée. Peut-être. Mais le lecteur s'y retrouve. S'il est malheureux, il peut y voir un moyen de ne pas se décourager. S'il est joyeux, il se satisfait de tenir entre ses mains ce qui a pu l'y amener.

Cela fait du bien, aussi, d'accepter cette facilité, et de se laisser irradier par cette bouffée d'optimisme, communicative. Lorsqu'on ferme le livre, on a pris du plaisir : «on sourit de contentement, on respire d'aise, on s'étire de satisfaction, comme un chat repu auprès d'un bon feu». Mais plus encore, l'on a envie d'avoir le coeur en joie. Bientôt «nous levons les bras au ciel, nous dansons, nous sautons, nous chantons».

Julie Malapert
( Mis en ligne le 08/01/2018 )
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