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Bande dessinéeet Manga  

Lady Snowblood (vol.3) - Epilogue
de Kazuo Koike et Kazuo Kamimura
Dargaud/Kana - Sensei 2008 /  12,50 €- 81.88  ffr. / 380 pages
ISBN : 978-2-505-00306-9
FORMAT : 13x18 cm

Samuraï Blanche Neige

Yuki trouve un poste de professeur de gymnastique suédoise dans un établissement pour jeunes filles. Ceci déplaît fortement aux membres locaux d’un groupuscule nationaliste qui tente d’intimider l’effrontée.

C’est avec plaisir que l’on retrouve l’héroïne vengeresse de Koike et Kamimura, à l’intransigeance aussi affûtée que la lame de son katana. Cette provocatrice émancipée qui ne connaît ni le remords, ni la pitié, bouscule avec jubilation les codes sociaux de son époque et brise le carcan traditionaliste qui enferre la femme japonaise dans un statut de soumission. Rebelle et libre, Yuki mène avec impétuosité une lutte sans relâche contre toutes les formes de réaction. Elle aurait pu être un personnage revêche et aigri par son combat, mais les auteurs ont su lui adjoindre une sensualité souvent suggestive avec, en filigrane, une charge érotique patente. La fierté qu’affiche l’imperturbable visage de cette troublante héroïne émeut autant qu’elle inquiète, et le paradoxe se poursuit lorsqu’elle fait en permanence montre d’une grande maîtrise de soi tout en bouillant intérieurement et fomentant de terribles vengeances.
Le manga marque surtout par son élégance, qui s’exprime notamment au travers de sublimes scènes de combats, envoûtantes chorégraphies meurtrières au charme poétique. Souvent crue et sans ambages, l’œuvre séduit grâce à un ton tout à la fois abrupt et éthéré. Les auteurs n’y vont en effet pas par quatre chemins : scènes de tortures et massacres divers inondent ainsi les pages d’une violence particulièrement dure, suscitant un malaise terriblement efficace chez le lecteur.
Lady Snowblood est aussi une chronique sur la société japonaise du début de l’ère Meiji, avec ses archaïsmes et ses tourments. Le pays est alors replié sur lui-même, persuadé de sa suprématie, et s’enlise dans un militarisme inquiétant. Le système politique d’alors est décrit comme désuet, voire barbare, n’hésitant pas à faire appel à de sanglantes répressions pour faire taire toute voix opposante. Koike et Kamimura s’inspire de la vie de personnages historiques pour alimenter le réalisme de la peinture sociale qu’ils s’efforcent de reconstituer, et dressent un portrait peu flatteur du régime impérial de l’époque. La place de la femme, le totalitarisme de la police militaire, la course à l’armement contre laquelle les mouvements anarchistes tentent en vain de lutter, mais aussi les visées impérialistes du pouvoir sont autant de stigmates d’une époque en pleine mutation que la série pointe du doigt avec un immense brio.

Océane Brunet
( Mis en ligne le 25/09/2008 )
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