L'actualité du livre
Bande dessinéeet Fantastique  

Le Bleu du ciel (tome 1) - Dame Lucifer
de Kara
Soleil 2007 /  12.90 €- 84.5  ffr. / 48 pages
ISBN : 978-2849468715
FORMAT : 23,4x32,3 cm

Drôle de diable

La fin du monde est pour demain, ou pour hier en fait, le 25 décembre 2000 exactement, date à laquelle Lucifer succède à Dieu dans la gestion de la Terre et de son agaçante humanité. Mais avec ces histoires de calendrier Julien et Grégorien, le diable arrive avec 3 ans d’avance : une bonne occasion de faire un peu de tourisme et d’apprendre à découvrir l’humanité. Avec Lilith, doyenne des vampires comme guide, le voilà parti à l’aventure… Mais ce serait sans compter une mystérieuse confrérie démoniaque, qui entend bien brûler les étapes, même si pour cela, il faut s’en prendre au patron et faire la révolution… Beau programme !

À première lecture, le scénario concocté par Kara pour une série haute en couleur, Le Bleu du ciel, a tout pour satisfaire l’amateur de fantastique apocalyptique, avec zeste d’occultisme et force effets magiques… Oui, mais (car il y a un mais) attention à vos stéréotypes, ça décoiffe un peu : tout d’abord Lilith – modèle du vampire – est une jeune fille plutôt accorte, genre midinette, le croc discret et la babine soignée, romantique en diable (eh, eh) et qui s’accommode parfaitement du soleil et de ses rayons (toujours ça de pris pour le mythe du vampire). Quant à Lucifer, c’est également une jeune fille un peu myope, plutôt gentille (elle va se battre en dehors de la ville pour ne pas effrayer l’humanité : si c’est pas une BA, ça ?) qui décide d’apprendre à connaître les humains au risque de les apprécier… le genre gentille démone en somme, humaniste et gavée de bons sentiments. On est loin du grand cornu, du mal incarné, de l’antéchrist et de l’enfer sur terre. Alors forcément, c’est un peu iconoclaste, un peu anti-conformiste, un peu déstabilisant, pas très diabolique.

Certes, le graphisme est efficace : mélange de manga (le regard kawaï des héroïnes, les armes démesurées, la plastique toute nippone…) et de classicisme (dans les décors, genre Europe centrale steampunk) aux couleurs crépusculaires, avec un goût du détail et un sens du rythme et de la mise en scène tout à fait réussi. L’album se lit d’une traite et graphiquement, c’est un vrai bonheur… mais on n’y croit pas des masses, à cette gentille diablesse qui se bat pour préserver la vie et l’humanité. Si le meilleur tour du Diable, c’est de faire croire qu’il n’existe pas, on peut dire que là, c’est réussi. En bref, Kara livre, avec cet album, une série à l’esthétique soignée, et dont le thème est très prometteur, mais le tout baigne dans une guimauve bien peu compatible avec la férocité supposée de la Bête… À moins que l’ensemble ne soit destiné qu’aux ados, émotifs par nature (???). La suite s’impose, l’essai – prometteur - est à transformer, mais rendons à Lucifer ce qui revient à Lucifer !

Gilles Ferragu
( Mis en ligne le 10/09/2007 )
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