L'actualité du livre
Bande dessinéeet Science-fiction  

Zhong Guo
de Hermann et Yves H.
Dupuis - Aire Libre 2003 /  12.94 €- 84.76  ffr. / 56 pages
ISBN : 2-8001-3410-0
FORMAT : 24 x 32 cm

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L’histoire se passe à Pékin, dans un futur apparemment pas trop éloigné (la seule grosse différence avec aujourd’hui est que les voitures n’ont plus de roues). Les régimes politiques sont les mêmes qu’aujourd’hui et, de fait, les auteurs n’ont guère cherché à deviner l’avenir qui attend la société chinoise contemporaine, pourtant en mutation rapide. Le contexte de la guerre froide des années 1950 est purement et simplement adapté. La Chine remplace simplement l’URSS, avec les mêmes caractéristiques : drapeaux rouges, parti unique, affiches de Mao dans les rues. Seules quelques affiches de propagande évoquent l’évolution récente de la Chine vers le capitalisme («I am a good communist, I spend 50 yuans a day»). L’une d’entre elles fait le fréquent clin d’œil des auteurs à leurs lecteurs : «Dupuis presents Zhong Guo by Hermann & Yves H.»

Le décor de l’aventure ajoute au contexte de la guerre froide et aux quelques hypothèses futuristes, les catégories traditionnelles de l’exotisme. Puisque l’action se passe en Chine, il ne saurait être question de se passer des éternelles « triades », des temples orientaux voisinant avec les modernes gratte-ciel – et des jeunes et ravissantes chinoises nues entourant l’adipeux méchant. Au total, un environnement très classique, qui introduit d’emblée le lecteur dans du déjà maintes fois vu, en particulier au cinéma. Comme les décors, les dialogues rappellent le commun des films d’action («tant que nous serons au milieu de la foule, ils n’oseront pas tirer… Holy shit ! un barrage !… Ils n’ont pas perdu leur temps ! Merci pour le comité d’accueil, messieurs, mais ce sera pour une autre fois !»). La référence cinématographique, d’ailleurs, s’impose de plus en plus dans ce style de bande dessinée ; et cela va jusqu’à la présence d’une scène d’exposition musclée de dix planches au moins (et de plus de morts encore) précédant le titre. Quand on lit enfin : «Zhong Guo. Dessin : Hermann. Scénario : Yves H. », on sait à quel genre de narration on a affaire. Une variation sur le thème de James Bond – ou d’Alias.

Bien sûr, l’histoire a lieu dans le futur et donc l’affaire se corse. D’une part, les Etats-Unis ne sont pas un camp aussi mécaniquement bon que dans les films américains du temps de la guerre froide – en tous cas si l’on veut bien considérer que la fin ne justifie pas les moyens. D’autre part, les sophistications de la technique ne font pas l’objet de la même vénération que celle qui anime James Bond recevant les cadeaux de «Q». Ici, les ordinateurs et les médecins, omniprésents, délivrent un message peu neuf, évoquant la crainte de l’effacement de la frontière entre l’homme et la machine.

Du classique, donc, ce qui ne veut pas dire du négligeable. Hermann est un dessinateur extraordinaire et le prouve une fois encore, au fil de planches superbes, parfois presque sans texte. On se surprend à penser que certaines de ses aquarelles feraient de somptueuses lithographies (la case représentant une jeune Chinoise de dos, sortant du bain, page 23, par exemple). Et le récit, même s’il est parfois un peu confus, est globalement bien mené, fondé surtout sur le sens du suspense du scénariste, jusqu’au dénouement final.

Sylvain Venayre
( Mis en ligne le 09/12/2003 )
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